Exagérément dogmatiques, les islamistes ont montré, à l'occasion des débats et du vote du projet de loi pénalisant les violences faites aux femmes, tout le désamour qu'ils éprouvent envers la femme. Indistinctement de leur chapelle partisane, les députés islamistes se sont retrouvés, jeudi, sur une même position, à savoir le boycott de la séance plénière de l'Assemblée populaire nationale (APN) consacrée au vote du projet de loi amendant le code pénal portant de nouvelles procédures inhérentes à la protection de la femme contre les violences physiques et morales. Les députés du MSP, El-Islah, Ennahda et El-Adala se sont, en effet, démarqués du projet de loi en question au motif, avaient-ils argué, qu'il est attentatoire aux prescriptions de l'islam et que ses dispositions seraient une menace pour la famille algérienne. Il faut dire qu'ils se sont mobilisés comme ils ne l'ont jamais été pour tenter de faire capoter le projet de loi. Dès mardi, jour de l'ouverture des débats autour du texte en question, les députés islamistes ont sonné la charge. Leur tentative de faire fléchir le gouvernement a été vaine. Pas totalement, cependant, puisque le texte voté par la plénière fait tout de même une petite fleur aux islamistes et autres conservateurs, en disposant que les poursuites judiciaires, s'agissant de violences conjugales, sont stoppées, sauf dans certains cas, dès que la victime retire sa plainte. Mais cette concession n'a pas été à même de ramener les islamistes à un meilleur sentiment. Pour eux, il ne devait même pas y avoir de débat autour de la question. Les députés islamistes ont donc tout bonnement appelé au retrait du projet de loi, considérant qu'il va à l'encontre des principes et de la culture de la société algérienne. Cet arrêt des poursuites, sauf cas de blessures graves, n'a pas été du goût des députés du Parti des travailleurs qui ont estimé que cette brèche ouvre la voie à l'impunité et induirait chez la femme un sentiment de culpabilité. Aussi, embrayant sur cela, le Parti des travailleurs s'est abstenu de voter le projet de loi. Cette disposition a également été dénoncée par la section algérienne d'Amnesty International, même si elle a jugé la loi en question globalement progressiste. Le ministre de la Justice, Tayeb Louh, outre le boycott des islamistes, l'abstention des députés du Parti des travailleurs et le manque d'enthousiasme des députés de son propre parti, le FLN, ne s'est pas laissé intimider. Répliquant aux islamistes, qui ont vainement tenté de puiser dans l'argument religieux pour faire entendre "leur cause", Tayeb Louh a souligné que la protection de la femme contre les violences n'est aucunement en contradiction avec les préceptes de l'islam. Le projet de loi, voté, donc, en dépit du boycott des islamistes, renforce les sanctions à l'encontre des auteurs des violences contre les femmes. Les sanctions prévues sont en fonction de la gravité des blessures ou des préjudices causés. Le texte de loi pénalise également les violences et le harcèlement sexuels, ainsi que toutes les formes de harcèlement dans les lieux publics. Les peines sont plus lourdes lorsque la victime est une mineure. Ainsi, le texte stipule que quiconque donne volontairement des coups à son conjoint, et en fonction des blessures, risque de 1 à 20 ans de prison avec la réclusion à perpétuité en cas de décès. Il prévoit aussi une peine de six mois à deux ans de prison contre quiconque exerce sur son épouse des contraintes afin de disposer de ses biens ou de ses ressources financières. S. A. I.