Le projet de loi relatif à la protection de la femme contre toutes les formes de violence a été adopté, jeudi, à l'Assemblée populaire nationale (APN). Le texte a été validé grâce au «oui» des députés FFS, FLN, RND et indépendants. Le Parti des travailleurs, qui avait pourtant accueilli favorablement ce projet, s'est abstenu lors du vote, estimant que le gouvernement «aurait pu mieux faire». Le parti de Louisa Hanoune conteste notamment la notion de «pardon» de la victime qui annulerait les poursuites judiciaires contre son agresseur. Le PT avait d'ailleurs introduit une proposition d'amendement pour annuler cette disposition, qui n'a pas été retenue. Ce projet de loi est l'un des rares textes à avoir suscité un débat houleux au niveau de la Chambre basse du Parlement. Les élus des partis islamistes se sont, en effet, distingués par une farouche résistance à ce projet. Les quatre formations islamistes siégeant à l'APN – MSP, El Islah, Ennahda et El Adala – ont tenté, durant deux jours de débat, de faire pression sur le gouvernement pour qu'il retire ce projet qu'ils qualifient de «contraire aux préceptes de l'islam». Jeudi, lors de la séance de vote, les islamistes ont boycotté la plénière tout en insistant sur le retrait pur et simple de ce projet qui risque, selon eux, de «disloquer la cellule familiale» en plus de son opposition «aux principes et à la culture de la société algérienne». Des accusations rejetées en bloc par le ministre de la Justice, Tayeb Louh. Dans sa réplique aux islamistes, il a insisté sur le maintien de ce texte de loi et annonce, dans la foulée, l'engagement de réformes plus profondes : «C'est pour nous un djihad.» Et d'asséner à l'adresse des islamistes : «Protéger l'épouse des coups et blessures volontaires, provoquant un état d'invalidité ou causant l'amputation, une invalidité permanente ou la mort de la victime va-t-il réellement disloquer la famille ? Le gouvernement va-t-il réellement transgresser les principes de la charia en sanctionnant le harcèlement moral, la maltraitance, le harcèlement sexuel, le harcèlement contre les femmes et les mineures dans les endroits publics ?» Tayeb Louh va plus loin dans ses arguments et s'appuie sur des exemples concrets : «Nul n'ignore que dans certaines région d'Algérie, des tribus s'affrontent à cause de la violence à l'égard des femmes. Les harcèlements contre les femmes, notamment dans des lieux publics, se sont souvent soldés par des meurtres. Le vide juridique qui existait en la matière a favorisé cet affrontement.» Le ministre a ajouté également qu'il ne pense pas que dans les douars ou les zones reculées d'Algérie, la femme s'opposerait à un tel texte juridique qui la protège elle et sa famille. Ce texte de loi, a-t-il expliqué, a tenu compte des volets culturel et cultuel propres à la société algérienne. «A travers l'adoption de ces nouvelles dispositions introduites au code pénal, l'Algérie connaîtra davantage de progrès en termes de réformes pour combler le vide juridique, pour mieux prendre en charge certains fléaux sociaux passés sous silence», a-t-il indiqué. Et pour rassurer les députés du PT, le ministre a ajouté que le pardon de la victime met fin à toute poursuite judiciaire, sauf dans certains cas. Il faut préciser qu'au sein du FLN, des députés ont préféré ne pas assister à la séance consacrée au vote du projet de loi ; d'autres ont proposé plusieurs amendements, notamment la suppression de l'article qui punit la violence morale et verbale contre la femme, estimant qu'il serait impossible de le prouver devant le juge et l'article 330 bis pénalisant «la violence financière contre la femme». Des amendements qui n'ont pas été approuvés. Gêné, le chef du groupe parlementaire FLN, Tahar Khaoua, a demandé un point d'ordre pour lire une courte déclaration au nom du parti, affirmant «le soutien du FLN aux réformes du président Bouteflika». Par ailleurs, le ministre de la Justice a annoncé la finalisation du projet de loi amendant le code de procédure pénale soumis jeudi au secrétariat général du gouvernement. Le texte, selon M. Louh, comporte des amendements profonds de nature à consolider l'autonomie de la justice.