Dans le cadre d'une étude ayant pour objet le bâti ancien caractérisant les maisons traditionnelles kabyles, les étudiants de 4e année du département d'architecture du pôle universitaire de Tamda, relevant de l'université Mouloud- Mammeri de Tizi Ouzou, ont jeté leur dévolu sur le village d'Ihitoussène, dans la commune de Bouzeguène, 60 km à l'est de Tizi Ouzou. Quatorze étudiants, dont 9 filles, se sont déplacés, samedi dernier, dans ce village qui recèle un grand nombre de maisons anciennes, notamment des vieilles habitations regroupées dans le vieux quartier du village, autour de tajmaât et de la mosquée. L'ensemble des habitations surplombe la fontaine ancestrale de Tala, l'une des plus anciennes, avec celles d'El-Qarn, près du cimetière du village. Ce vieux quartier, en grande partie à l'abandon, résiste encore aux aléas du temps et aux caprices de la nature, mais les maisons construites en pierre et en terre et recouvertes de tuiles incurvées se dégradent au fil des années sous les infiltrations d'eau qui pourrissent les poutres de la toiture avant de céder sous le poids de la neige en hiver. L'ensemble des maisons arbore pratiquement la même architecture de la Kabylie ancienne. C'est ce qui a intéressé le groupe d'étudiants qui a été accueilli par des membres de l'association des femmes "Tahittoust" et de l'association "Sevaa Zzvari" (les sept enclumes) du village Ihitoussène, devant le musée de la forge inauguré en août dernier par le wali de Tizi Ouzou, lors de la grandiose et mémorable fête de la forge. Après la visite du musée ponctuée d'une pause et d'une collation, les étudiants se sont dirigés vers Tahanuts n Tejmaât (la forge de la place du village), la première forge ancestrale où se sont formés les premiers ciseleurs de fer de la cité des forgerons. Les étudiants ont reçu des explications sur le noble métier de forgeron et sur l'art du forgeage avec manipulation du soufflet, du marteau sur l'enclume, et pris succinctement connaissance de l'histoire de la forge et du village d'Ihitoussène, jadis grand village de forgerons dont la renommée a même franchi les monts de la Kabylie, puisque de nombreux Ihaddadène se sont installés dans de nombreuses contrées de l'Algérie profonde. Les étudiants en architecture ont été ensuite conduits à travers les ruelles du village pour visiter une huilerie ancienne à Anar Amejtouh, puis la fontaine d'El-Qarn et enfin le vieux quartier des Ath Moussa où des maisons anciennes bâties en pierre ont été auscultées de fond en comble par les jeunes architectes. Des pierres ornées de gravures rupestres et d'inscriptions datant d'une époque très lointaine subsistant encore sur la vieille façade d'une maison ont suscité un intérêt particulier auprès des visiteurs, encore que ces dessins doivent faire l'objet d'une étude anthropologique de la part des spécialistes, car le mystère de ces gravures anciennes demeure encore inconnu. La structure intérieure d'une maison kabyle a été ensuite savamment expertisée par les étudiants qui ont pris des photographies, mais aussi des mensurations des différentes parties internes de la maison ainsi que leur agencement architectural. Rudimentaires, certes, mais très ingénieuses dans leur conception architecturale, les anciennes habitations de Kabylie ont été conçues et réalisées avec des matériaux spécifiques qui ont été choisis pour leur solidité et leur capacité à protéger contre le froid et l'humidité en hiver, mais aussi contre les grosses chaleurs en été. C'est dire que l'architecture traditionnelle kabyle résultait, jadis, d'une incroyable alliance entre l'homme et son environnement. KAMEL NATH OUKACI