Apathique face au système fiscal international, le Panama continue de nourrir son vieux projet de faire de son territoire le plus puissant centre financier de l'Amérique Centrale. Pour réaliser cet objectif, le gouvernement a usé de tous les moyens y compris les plus illicites et indélicats. Depuis le début des années 1970, ce pays garantit un secret bancaire inviolable et une fiscalité zéro pour les revenus issus de l'étranger. Ce sont ces deux avantages attrayants qui, au fil des décennies, ont fait de Panama un véritable paradis fiscal par excellence. Panama fait partie de ces lieux qui inspirent confiance et offrent une tranquillité à tous les grands richards de la planète. Pourquoi ? Car, certains impôts y sont supprimés, d'autres proposés à des taux faibles. Mieux, sur cette discrète place financière, on y développe une sorte d'opacité sur les titulaires des comptes et des sociétés. Ces pratiques frauduleuses sur lesquelles les autorités ont souvent fermé les yeux, ont fini par faire sortir le pays de son habituelle discrétion. Le scandale éclata au grand jour avec les révélations contenues dans les millions de documents qui ont fuité du cabinet d'avocats panaméen, Mossack & Fonseca. Cette puissante société, au cœur du scandale Panama Papers, s'est spécialisée dans la création de sociétés offshore, des sociétés fictives ou "sociétés-écrans" permettant à de riches clients de dissimuler leur argent dans des paradis fiscaux. Elle a su profiter de la dictature de Noriega entre 1984-1990. L'un de ses fondateurs, Jürgen Mossack, d'origine allemande, est fils d'un ancien officier de la Waffen-SS. Son cofondateur, Ramon Fonseca Mora, est réputé pour ses connaissances du monde politique, même sous la dictature. Il est en outre le vice-président d'un parti nationaliste panaméen, le Parti panamiste, qui est proche du chef de l'Etat, Juan Carlos Valera. Créé en 1977, le cabinet a pu vendre à ses clients aux grandes fortunes, investisseurs et autres...une garantie de confidentialité absolue. Le mystère, qui a caractérisé ses activités, vient d'être levé avec la fuite des documents révélant les avoirs dans les paradis fiscaux de 140 responsables politiques ou personnalités de premier plan. Le gouvernement panaméen a affiché la volonté de se mettre en conformité avec les standards internationaux de transparence en matière de fiscalité établis par l'OCDE. Par ailleurs, depuis la publication du rapport de 2010, le Panama a signé une convention d'échanges d'informations avec 12 partenaires, y compris des Etats importants de l'OCDE. Ce pays est sorti ainsi de la liste grise de l'Organisation en juillet 2011. L'OCDE a, en effet, imposé une nouvelle norme mondiale unique relative à l'échange automatique de renseignements entre autorités fiscales du monde entier. Elle oblige les pays à se mettre en conformité avec les standards fiscaux internationaux en signant une douzaine de conventions établissant l'échange d'informations fiscales. Cependant, face à la pression internationale, les "experts" de l'offshore, à l'instar du cabinet Mossack Fonseca, trouvent une nouvelle parade pour préserver la discrétion de leurs clients grâce à la complicité de plus de 14 000 banques et sociétés d'avocats fiscalistes qui servent d'intermédiaires financiers. Le Panama a toujours été ciblé par les organismes de régulation. Ce pays ne s'est, en fait, jamais engagé pleinement pour la transparence dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale. Il faut noter qu'une liste européenne de 30 paradis fiscaux non coopératifs a été rendue publique en juin 2015 par la Commission européenne. Le commissaire européen pour les Affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, évoquait alors "des estimations faisant état de 17 000 milliards d'euros stockés dans les paradis fiscaux. Cela étant, la tendance est maintenant à la transparence et non plus au secret bancaire". B. K.