La commission de discipline de la Ligue nationale de football a traité l'affaire des incidents ayant émaillé la rencontre de Ligue 2, CRBAF-ASK, d'une façon pour le moins qu'on puise expéditive — légère serait le mot juste. Elle a infligé une sanction de quatre matches à huis clos contre le club fautif en l'occurrence Aïn Fakroune. "La Commission de discipline, réunie lundi 9 mai 2016, a infligé 4 rencontres à huis clos pour le CRB Aïn Fakroun suite aux incidents qui se sont produits lors de sa rencontre face à l'AS Khroub le vendredi 30 avril en match comptant pour la dernière journée du championnat Mobilis de Ligue 2" note le communiqué de la LFP qui précise "que la commission a adressé une convocation au président de l'US Chaouia pour le 16 mai", sans doute pour s'expliquer après ses attaques contre des responsables de la FAF, du CRBAF et de l'ASK. Fin du verdict de la LFP. Pourtant, l'affaire mérite que la LFP s'y attarde un peu plus : il s'agit bien là d'un grave précédent qui a vu des supporters d'un club envahir le terrain pour forcer la main à leurs joueurs afin de lever le...pied. Une évidence étayée par les propos de l'un des acteurs de cette mascarade à savoir le joueur du CRBAF, Hichem Souakir dont il faut saluer le courage. Dans une déclaration à la chaîne El Heddaf TV, Souakir fait une révélation fracassante. "Notre intention était de jouer le jeu à fond sans fausser les calculs. C'était l'instruction de l'entraîneur et des dirigeants. Nous avons joué pour gagner mais les supporters nous ont menacés après l'envahissement de terrain. Ils nous ont obligés à laisser l'ASK marquer un but. On n'avait pas le choix. Nos vies valent bien mieux que les trois points de la rencontre", explique Souakir . Et d'ajouter : "Je ne comprends pas cette animosité entre les supporters du CRBAF et l'USC, je demande pardon aux Chaouis qui ont été relégués par notre faute...". Cette affirmation ignorée bien sûr par la LFP tombe justement sous le coup de l'article 81 du code disciplinaire de la Ligue de football. La LFP tente une diversion avec Yahi "La tentative d'influence sur le cours du championnat prévue par l'article 123 du règlement du championnat de football professionnel est sanctionnée par : match perdu (sans attribution de points à l'équipe adverse); défalcation de neuf (9) points; deux (2) ans de suspension fermes de toute fonction officielle pour la personne concernée du club ; un million de dinars (1 000 000 DA) d'amende pour le club" stipule cet article que la commission de discipline a complètement zappé. Dans ce cas de figure, ce sont les supporters qui sont mis en cause mais dans l'esprit de la loi, l'absence de "personne concernée" n'absout en rien le club, en l'occurrence le CRBAF. "Souakir n'a pas évoqué un cas de corruption" rétorque le président de la LFP, Mohamed Kerbadj, c'est vrai mais il évoque "une tentative d'influence sur le cours du championnat" qui est également punie par la loi. En outre, l'arbitre de la rencontre CRB Aïn Fakroun-AS Khroub, M. Brahimi, porte une lourde responsabilité dans la relégation de l'US Chaouia. En effet, on jouait les derniers instants ( 90') de la rencontre, le score était vierge entre les deux équipes alors que dans l'autre côté à Oum El-Bouaghi , l'USC se faisait accrocher par la JSMB (1-1). À ce moment-là, l'ASK était en Ligue 2 et l'USC se maintenait, mais en raison de la rivalité absurde qui existe entre les supporters de l'USC et ceux du CRBAF, ces derniers envahissent le terrain pour forcer leurs joueurs à lever le pied et laisser donc l'ASK marquer un but synonyme de victoire. Au lieu de siffler la fin du match, l'arbitre fait jouer les temps morts au bout de 26 minutes d'arrêt de jeu, ce qui permit à l'ASK d'inscrire son but salvateur. Or, selon les directives de la Ligue, l'arbitre est obligé de siffler la fin du match en cas d'envahissement de terrain. Il ne l'a pas fait. Par sa faute, l'arbitre s'est rendu complice d'une machination contre l'USC ; ce que la LFP feint aussi d'ignorer alors qu'un résultat technique d'une rencontre ne peut pas être homologué s'il n'est pas obtenu dans des conditions de jeu acceptables. Cela correspond à une erreur administrative. La logique et le bon sens auraient voulu dans cette affaire que la rencontre CRBAF-ASK soit rejouée à huis clos. C'est la seule façon d'effacer les soupçons qui pèsent sur cette rencontre et d'en faire un exemple à tous ceux qui veulent bafouer l'éthique sportive. Ce qui s'est passé est écœurant, choquant, honteux pour l'image du football national. C'est le triomphe de la bêtise humaine sur l'éthique sportive. C'est facile d'affirmer que l'USC n'avait qu'à gagner devant la JSMB pour assurer son maintien et ne pas compter sur un coup de main de Aïn Fakroun, c'est du reste en partie vrai mais il est malhonnête aussi d'ignorer le coup de poignard du CRBAF et la trahison de ses supporters. Alors lieu de se pencher sérieusement sur cette affaire et lui accorder un traitement juste et équitable, la LFP tente maladroitement une diversion. Elle convoque le président Yahi pour qu'il s'explique sur ses déclarations notamment lorsqu'il dit sur une chaîne TV qu'il a déjà combiné un match de championnat. Yahi sera sans doute sanctionné. Il l'aura mérité car la combine est un fait grave. Cependant, le fond du problème restera le même : des supporters peuvent-ils obliger leurs joueurs à lever le pied sans risquer quoi que ce soit ? Les fans ont-ils le droit de rentrer sur le terrain afin d'intimider les joueurs de l'équipe adverse pour les amener à céder les points du match sans risquer quoi que ce soit ? Là est toute la question ! SAMIR LAMARI