Résumé : Pour réaliser le vœu de sa mère, Tahar consentira à se marier avec sa cousine. Mais les choses tournent au vinaigre. Cette dernière refuse de rester au village, et le jeune homme se voit dans l'obligation de l'emmener vivre en ville. Sa vieille mère les accompagnera. Ma mère, qui passait de longues heures à tourner en rond dans la maison, faisait le ménage et préparait les repas. Elle avait troqué ses anciennes habitudes contre d'autres, et ne se plaignait pas trop. Mais je sentais sa peine. Et ses tentatives de paraître gaie et heureuse n'étaient pas pour me rassurer. Deux années plus tard, ma grand-mère rejoint ses ancêtres, alors que Fadhéla mettait au monde notre premier enfant. Une joie entachée de tristesse ! Mais paradoxalement, ce sera la première fois où je constatais que ma mère avait enfin retrouvé sa sérénité d'autrefois. Ce bébé, qu'on prénommera Saïd-Lyès, la comblera de joie. Elle oubliera son deuil et les circonstances de cette naissance, et ira jusqu'à pousser des youyous à la clinique, ce qui ne plut pas du tout à mon épouse. De retour à la maison, ma mère se proposera de prendre en charge le bébé. Elle me demandera d'installer le berceau ramené du village dans sa chambre, et passera de longues heures au chevet de son petit-fils. Nuit et jour, elle veillera à son confort. Fadhéla reprendra son travail, et moi mes études à l'Ecole des beaux-arts où je donnais aussi quelques cours. Deux fois par semaine, je travaillais pour une agence de publicité. C'était moi qui illustrais les textes, donnais du relief aux panneaux, conseillais les clients, etc. Je ne pouvais me plaindre étant donné que le salaire était motivant. Une autre année s'écoule. Je décroche enfin mon diplôme à l'Ecole des beaux-arts où on me proposera d'enseigner cette fois-ci à plein temps. Ma mère et mon fils rendaient aussi mon quotidien moins lugubre. Par contre, entre mon épouse et moi, c'était toujours la guerre. Une guerre déclenchée dès le début de notre union, et cela continuait. Ma femme me trouvait trop lunatique, trop sensible et trop rêveur. Mes succès d'artiste la laissaient de marbre, et pis encore, elle essayait à chaque fois de me mettre des bâtons dans les roues, allant jusqu'à dérober certaines invitations à des festivals, ou des convocations pour assister à des conférences et à des rencontres entre artistes. Ma mère suivait ces scènes de ménage d'un œil critique. Elle tentait souvent de remédier aux dégâts occasionnés par les sautes d'humeur de Fadhéla qui était aussi acariâtre et acerbe dans son langage envers sa belle-mère. Mais ces choses-là, ma pauvre maman les gardait pour elle-même... Mon épouse était sa nièce. Ma maternelle respectait les liens familiaux, et savait aussi que si cela ne dépendait que de moi, je n'aurais pas tardé à divorcer... Les années passaient l'une après l'autre sans apporter de changement. Mon second fils, Malik, vint au monde, alors que Saïd faisait ses premiers pas à l'école. J'étais heureux de donner un second héritier à la famille, et ma mère l'était encore plus. Elle avait élevé Saïd et s'occupait toujours de son éducation ; elle comptait faire la même chose avec Malik mais ma femme s'y opposa. Elle ne voulait pas que son second fils soit éduqué par une illettrée ! Offusquée, ma mère versera, cette fois-ci, des larmes d'amertume. Une énième scène éclatera entre Fadhéla et moi. Mon épouse voulait éduquer elle-même ses deux enfants. Les manières paysannes de sa belle-mère la rendaient malade, me lança-t-elle au visage, tout en oubliant qu'elle-même et ses parents étaient des paysans de la même branche... (À suivre) Y. H.