"Les milieux d'affaires qui soutiennent le régime n'auraient jamais été mis en cause s'ils n'avaient pas été suspectés de vouloir peser sur les choix liés au rendez-vous électoral de 2019", estime le parti de Benflis. Le constat semble presque unanime : le bras de fer engagé entre Abdelmadjid Tebboune et certains milieux d'affaires, dont des rebondissements ne sont pas à écarter dans les prochaines semaines, sont liés à l'enjeu de l'élection présidentielle de 2019. Dans un communiqué rendu public hier, à l'issue de sa réunion mensuelle, le bureau politique de Talaie El-Houriat soutient qu'il a la "ferme conviction" que les milieux d'affaires qui soutiennent le régime n'auraient jamais été mis en cause s'ils n'avaient pas été suspectés de vouloir peser sur les choix liés au rendez-vous électoral de 2019 qui constituent, pour le pouvoir, "une ligne rouge à ne pas franchir". "La guerre n'est pas menée contre la corruption, mais contre ceux qui auraient tenté de franchir cette ligne rouge, qu'ils soient personnalités politiques ou détenteurs des produits de la rente", écrit le parti d'Ali Benflis. D'ailleurs, il ne dissimule pas sa préoccupation face à l'exacerbation de la crise au sommet de l'Etat étalée ouvertement sur la place publique. "Le BP a relevé, avec une extrême préoccupation, la confusion créée au sommet de l'Etat par l'exacerbation de la lutte des clans au sein et à la périphérie du pouvoir, avec en perspective l'échéance de 2019", note Talaie El-Houriat. "Cette situation, poursuit-il, qui influe négativement sur la gestion des affaires de l'Etat, est significative d'une aggravation de la crise de régime et de la profondeur de l'impasse politique générée par la vacance qui perdure au sommet de l'Etat ; impasse qui a dégénéré en un délitement des institutions et constitue un danger pour la stabilité du pays et la sécurité nationale." À l'inverse de certaines grilles de lecture, le parti de Benflis n'accorde pas de crédit aux velléités affichées de séparation de l'argent de la politique, encore moins de faire le procès des gouvernements précédents. Pour lui, cette démarche procède "d'un ravalement de façade du régime" pour donner l'illusion de changement. "Il est (...) difficile aujourd'hui de faire croire à l'opinion publique que le gouvernement est dans une logique de lutte contre la corruption. Le BP ne nourrit, à cet égard, aucune illusion quant à la sincérité du pouvoir en place. Il ne croit pas que le pouvoir en place puisse combattre sa raison d'être", soutient-il. "Il ne faut pas être dupe pour s'attendre à ce que ceux qui ont siphonné les fonds publics et ceux qui les ont aidés et accompagnés pour le faire soient sanctionnés. Ce serait faire le procès de tout le système politique en place", décrète Talaie El-Houriat. Tout en imputant la responsabilité "politique pleine et entière du pillage de l'économie nationale au pouvoir en place" et tout en dénonçant "l'appui et le laxisme" des gouvernants qui ont permis aux milieux d'affaires mis en cause aujourd'hui de s'emparer des marchés, le parti de Benflis considère que "la vacance du pouvoir et la neutralisation des contrepouvoirs ont facilité la mise en place d'un système opaque basé sur une collusion d'intérêts entre des gouvernants et des milieux d'affaires". Au chapitre économique, il relève que le gouvernement ne dispose pas de stratégie claire et continue à se référer à un programme "virtuel" du Président. Même les consultations projetées ne visent, selon lui, qu'à "impliquer ses partenaires dans la paternité d'une politique d'austérité qui porte, en vérité, la marque de sa seule responsabilité et de son échec". "Le BP réaffirme sa conviction que la crise est d'essence politique. Elle est le produit de la vacance du pouvoir qui a mené à l'impasse politique. Sa solution ne peut être que politique", conclut le texte. À noter que le parti devrait trancher la question de sa participation ou non à la prochaine élection lors du conseil national du parti prévue le 26 août 2017. Karim Kebir