Le désordre qui domine la gestion des affaires de l'Etat commence sérieusement à inquiéter. Les décisions prises par le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, en matière économique et les violentes réactions qu'elles ont provoquées à l'intérieur du sérail présagent d'un climat politique incertain. Ce qui fait dire au parti de Talaie El Hourriyet (Avant-gardes des libertés) «une extrême préoccupation». Le bureau politique du parti de Benflis réuni, hier, pour évaluer la situation politique du pays, relève, «avec une extrême préoccupation, la confusion créée au sommet de l'Etat par l'exacerbation de la lutte des clans au sein et à la périphérie du pouvoir, avec en perspective l'échéance de 2019». Si elle «influe négativement sur la gestion des affaires de l'Etat» elle est «significative d'une aggravation de la crise de régime et de la profondeur de l'impasse politique générée par la vacance qui perdure au sommet de l'Etat, impasse qui a dégénéré en un délitement des institutions et constitue un danger pour la stabilité du pays et la sécurité nationale», cingle le parti de Benflis. Prenant le soin de ne pas prendre parti dans le conflit qui agite la «maison du régime», la formation de Ali Benflis charge le pouvoir en bloc, et doute de sa volonté à «lutter contre la corruption qui est sa raison d'être». Il dit n'accorder «aucun crédit» à la campagne qui vise à combattre les forces de l'argent douteux qui sont la création du même pouvoir. «Le bureau politique se demande quel crédit peut être accordé à la ‘‘campagne contre la corruption'', le pouvoir n'ayant jamais fait montre de volonté politique de lutter contre ce fléau qui gangrène l'économie nationale et la société toute entière ayant miné les fondements de l'Etat, que dans les rares affaires de dilapidation de deniers publics qui ont été jugées, les personnalités impliquées ont été préservées, voire promues à des postes supérieurs dans les institutions de l'Etat ?» rappelle le parti des Avant-gardes des libertés. Pour ce dernier, il est «difficile aujourd'hui de faire croire à l'opinion publique que le gouvernement est dans une logique de lutte contre la corruption». Le parti de l'ancien candidat à la présidentielle d'avril 2014 ne se fait aucune «illusion quant à la sincérité du pouvoir en place» et assure ne pas croire que «le pouvoir en place puisse combattre sa raison d'être» Il explique par ailleurs que la mise en cause des milieux d'affaires est dictée par le soupçon de les voir peser dans la prochaine élection présidentielle. «Le bureau politique a la ferme conviction que les milieux d'affaires qui soutiennent le régime n'auraient jamais été mis en cause s'ils n'avaient pas été suspectés de vouloir peser sur les choix liés au rendez-vous électoral de 2019 qui constituent, pour le pouvoir, une ligne rouge à ne pas franchir. La guerre n'est pas menée contre la corruption, mais contre ceux qui auraient tenté de franchir cette ligne rouge, qu'ils soient personnalités politiques ou détenteurs des produits de la rente», analyse le parti. Et par voie de conséquence, il serait illusoire de «tracer une ligne de démarcation entre l'argent et la politique pour la simple raison que les forces de l'argent douteux sont la création même du pouvoir en place, qui leur a permis d'investir les institutions de l'Etat, dans leur seul intérêt», tance encore Ali Benflis. Imputant la responsabilité politique du pillage de l'économie nationale au pouvoir en place, le parti des Avant-gardes des libertés dénonce «l'appui et le laxisme des gouvernants qui ont permis aux milieux d'affaires mis en cause aujourd'hui de s'emparer des marchés, d'accéder aux crédits et au foncier agricole et industriel, souvent dans des conditions marquées de suspicion». Des gouvernements qui auront servi de «couverture institutionnelle et politique pour laisser émerger des forces à l'influence devenue considérable». Le parti de Ali Benflis remet sur la table ainsi «la vacance du pouvoir et la neutralisation des contre-pouvoirs» qui ont permis «la mise en place d'un système opaque basé sur une collusion d'intérêts entre des gouvernants et des milieux d'affaires». Il assure au final que seule l'émergence d'un régime démocratique peut constituer «l'unique antidote, à l'ingérence des forces extraconstitutionnelles et de l'argent douteux dans la gestion de l'Etat, est l'émergence d'un régime démocratique basé sur la volonté populaire et l'instauration d'un Etat de droit».