Qu'elle soit extraordinaire ou banale, on porte tous la tête haute où est écrit à notre front une destinée comme celle d'"Amélie Poulain et son fabuleux destin" (2001). Donc, s'il est prescrit par les faux dévots d'être un spectateur passif de sa vie, en revanche, ce n'est pas pêché que d'avoir de l'ambition et d'agir sur son destin pour inverser la défaite en victoire et de lever le voile de la tristesse pour laisser entrer le soleil dans notre vie. C'est en tout cas l'un des commandements qui se suggère à l'issue du tour didactique du 1er Salon du dessin d'Alger, où l'essentiel de l'exposition s'énonce autour de la résolution : "Dessinez vos desseins" au Musée public national d'art moderne et contemporain d'Alger (MaMa). À ce propos, l'intitulé y sied bien, notamment au prélude de la nouvelle année 2018 et son bouquet de bonnes résolutions. Du reste, l'«expo...», c'est aussi l'appoint ou plutôt l'aide à la renaissance du 1er Salon du dessin d'Oran en 2013, qui n'a pas eu l'intérêt escompté, dit-on. Et depuis, le dessin dort d'un "Sommeil profond" de Hicham Belhamiti, ce beauxariste de l'école de Mostaganem. Donc, "autant qu'il est haut placé dans l'emploi du temps de l'enseignement de l'art, autant qu'il reste ce mal-aimé des galeries d'art. Ceci dit, les allées du musée s'enjolivent également de nos souvenirs d'écolier, ainsi que des épluchures de nos crayons et celles de nos boîtes de crayons de couleurs qui se mêlent à l'odeur de la colle blanche, mais aussi au "Jeu" d'Akila Mouhoubi. D'entrée, l'on entend le "Chuintement au souk, Tlemcen" d'Abdelkader Belkhorissat qui conte à l'aide de sa pointe de crayon, le "Rayonnement de la vie quotidienne à Oran", où le regard du visiteur ira "au-delà d'El-Bahia" pour apprécier "Les figures africaines". Et de bled Sidi El Houari, l'artiste Djamel Eddine Benchenine nous convie aux cafés populaires de la Radieuse, où l'odeur de la "Massa'rt" (boule) de tabac à priser flotte dans les arabesques de fumée. C'est dire qu'un dessin peut y tenir même au cœur d'un mouchoir en papier, à l'exemple du croquis "The last prayer" d'Adel Bentounsi. Toutefois, on y entend aussi l'air mélodieux qui fuse des dédales des corons du regretté Pierre Bachelet, qui ajoute ainsi un bout de ciel bleu aux "Mineurs" d'Atef Berredjem qu'il a crayonné de sa... mine de plomb. Et, en ce qui a trait aux arts berbères, au patrimoine africain, andalou et islamique d'Asie, Hamza Bounoua s'illustre avec les "Moutons". Bien entendu, Amar Briki, l'enfant de l'antique Rusuccuru, l'actuelle Dellys, insuffle au MaMa, l'âme esthète et les parfums de l'Algérie profonde avec ses toiles «Paysages d'Algérie» qu'il croque de l'acrylique et de sa plume qu'il trempe dans l'encre et fusain. Certes, qu'à côté du sérieux du trait, il y'a aussi de l'humour que cueille pour nous, Mehdi Djellil, dans les champs de "Batailles" de notre société, où ce natif de Makouda effleure de son crayon, l'homme et le mal qu'il se fait à lui-même et à l'environnement. Au demeurant, l'apport de l'artiste-plasticien Mostafa Goudjil, donne plus de relief à l'art total qu'il a hérité de M'hamed Issiakhem, Mohammed Khadda et Jean-Michel Atlan, puisqu'il opère l'alliance entre le théâtre, la poésie et la littérature aux côtés de Kateb Yacine. Et, aujourd'hui qu'il porte le flambeau du mouvement du signe "Aouchem" aux côtés de Denis Martinez et Mesli, il lui est agréable qu'il expose son "dessin : série ville 2 & 3", eu égard à l'action pour laquelle il milite afin d'arracher un jour le "stop à la détérioration de l'esthétique architectural urbain et à l'avilissement de notre patrimoine historique". À ce sujet, le dessin "Patrimoine" de Driss Ouadahi évoque l'aspect urbain des banlieues d'Alger qui sont hérissées d'hideux blockhaus inachevés et qui incarnent "l'échec architectural et social" dans la voie des "Itinérantes" (étude) de Sadek Rahim. Et, puisqu'on est guidé à l'aide du "T" de l'architecte, autant faire une halte au pied de la nomenclature des métiers du bâtiment de Yazid Oulab afin d'admirer le "Mouvement horizontal" qu'a réalisé Fethi Hadjkacem et qu'il est loisible d'admirer à côté de l'œuvre de Sofia Hihat. Pour ce qu'est du design, la plasticienne Mounia Mya Lazali se focalise sur l'urgence de l'heure, soit l'africanité et les migrations à l'aide de sa toile "We will not go back", où elle pleure l'errance des réfugiés et leurs ballots si chargés de souffrances mais aussi d'espoir. Autre étape, celle de la nostalgie de Slimane Ould Mohand, où les "Histoires nous traversent" avec leur lot de déchirures, de tendresse et des rêves de Thilleli Rahmoun. Autant dire que notre bonne vieille terre est le souci leader du scénographe Abdelmalek Yahia qui a réalisé le "Ludisme" qu'il étale des "2 mains", "Les mains" et "La main 2" de Hellal Zoubir. Au chapitre de l'archive, le céramiste-sculpteur Sofiane Zouggar cultive la mémoire pour que nul n'oublie les turbulences que nous avions vécues durant la décennie rouge. Pour se faire, il nous propose "l'installation, détail du projet Caravan-Saraj" qu'il est loisible à nos lecteurs de découvrir au MaMa jusqu'au 5 mars prochain. Louhal Nourreddine