Cette illusion moderne d'une démocratie sociale qui songe à établir un faux semblant d'équité entre les différentes castes connue sous le nom de "grève ", s'est répandue de façon exponentielle depuis le début de l'année 2018 en Algérie, dans différents domaines sociaux et éducatifs. Ce phénomène répétitif, nous a amené à nous interroger sur les raisons sociales, économiques ou politiques qui sont à l'origine de cette détonation, soutenue par les explications du Dr Yahia Cherifi, sociologue à l'université Alger II. Le dialogue entre les syndicats et le gouvernement semble plus que jamais rompu, ou plutôt inexistant, cette situation est dû probablement au comportement enfantin dont font preuve les deux parties du litige, ils ne comprennent pas que toute bonne médiation doit comporter des concessions, par conséquent on se retrouve avec des grèves illimitées. D'un côté, le gouvernement, en sourdine, ne reconnait même pas la légitimité de ces grèves, ce qui n'est pas étonnant, comment vouloir une démocratie sociale alors qu'une démocratie politique est lointaine encore. De l'autre côté, le combat syndical est à bout de souffle, avec leur revendications, paradoxalement légitimes et indécentes. Et bien sûr, les citoyens payent les pots cassés, "on en a marre" clament certains, ça se comprend, avec les élèves qui se retrouvent en vacance d'été en plein hiver, de par cette situation on ne terminera jamais le programme, comme ce fût le cas pour les années précédentes. Dans une éternelle attente d'une prise en charge, les patients sont plus malades et certains sont obligés de recourir aux services des cliniques privées, déjà qu'avant ça n'allait pas, mais maintenant c'est l'enfer dans les hôpitaux, avec les effectifs réduits par la grève. Comment sommes nous arrivés la ? Le Dr Cherifi nous éclaire sur ce point : Partenariat Réd-DIG-"Liberté"(#RDL)/NOMAD (EPAU): Pourquoi la pratique des grèves, est devenue si courante en Algérie ainsi que dans le monde entier ? Est ce qu'on peut la considérer comme l'expression d'une prise de conscience sociale ? Dr. Cherifi : "il faut comprendre que la grève est un phénomène qui touche les sociétés des temps modernes, apparue par l'avènement de la réparation et la spécialisation du travail, par exemple la théorie marxiste, Karl Marx est une avant- garde de la naissance des idées de lutte émancipatrice des classes dominées dont les ouvriers et employés font partie, dans le but de tracer une limite. Ce phénomène s'est transmis aux pays arabes et à l'Algérie car ils ont adopté le régime capitaliste occidental, qui est d'une certaine manière la cause de ce mouvement car avant le droit de grève, les lois du marché capitaliste faisaient subir aux travailleurs toutes les exigences de leurs patrons ". - Pour revenir à notre contexte actuel, pourriez-vous nous expliquer pourquoi les secteurs médicaux et éducatifs sont-ils si sujets aux grèves en Algérie ? "Ces deux secteurs sont vitaux car ils touchent toutes les classes sociales , ils ont connu quelques changements structurels et organisationnels, cependant il n'y a pas eu de réforme du droit de travail pour s'adapter a ces changements, il faut comprendre que ces travailleurs appartiennent à la classe moyenne (médecin, enseignant...) qui se caractérise par un salaire précis, une quête vers de meilleures conditions de travail mais aussi la perpétuelle recherche d'une reconnaissance sociale. Pourquoi ? Car il y a eu un changement social en Algérie qui a causé la décadence de leur échelle sociale et la perte du prestige de ces métiers y compris pour les médecins et les enseignants, il y a de cela 20 ans, ces métiers possédaient une place sociale importante, ce qui explique leur revendications matérielles, organisationnelles pour améliorer les conditions du travail mais aussi retrouver la reconnaissance sociale perdue ces dernières années ". Ainsi, la grève dans un sens c'est une bonne chose pour notre démocratie sociale, un droit qui permet à la société de défendre ses convictions, mais cette réalité n'est peut être qu'une illusion, pour revêtir ce régime capitaliste d'une image égalitaire. Doria ADMAN Partenariat Réd-DIG-"Liberté"(#RDL)/NOMAD (EPAU)