La mise sur le marché récente d'une chymozyme cameline, une présure recombinante spécifique du dromadaire,a changé la donne. Elle a permis de tester de nombreux ferments pour obtenir des fromages goûteux,tels que halloumi, mozzarella, feta ou saint-paulin au lait de chamelle. L'élevage camelin et la valorisation de ses produits sont en pleine expansion en Algérie. Si le dernier recensement du cheptel national confirmait l'effectif d'un million de dromadaires dans le pays, l'Algérie devrait apparaître comme l'un des plus grands pays camelins au monde. En même temps, le pays connaît un engouement récent pour les produits camelins, viande en premier lieu et lait en second lieu. La consommation urbaine de ces produits a littéralement explosé depuis un peu plus d'une décennie dans le sud et d'autres villes des Hauts-Plateaux. En effet, dans la perspective du développement d'une filière cameline de qualité avec l'implantation de laiteries traitant du lait de chamelle, s'imposent des règles de base sur l'hygiène de la transformation qui sont identiques aux règles à appliquer pour d'autres types de lait, à savoir l'hygiène des locaux de la mini-laiterie. Selon Mme Aouachria Amira Narimane, inspectrice vétérinaire à l'inspection de la wilaya d'El-Oued, "pour éviter toute contamination, il faut concevoir des locaux facilement nettoyables et régulièrement débarrassés des poussières, des débris organiques et des toiles d'araignée. De même, il est préférable d'avoir un sol légèrement en pente pour faciliter l'évacuation des eaux de lavage. De plus, les locaux doivent être conçus pour respecter une marche en avant allant des pièces les moins propres (livraison du lait, entrée du personnel) aux pièces les plus propres (transformation et stockage des produits)". À propos de la transformation, les phases les plus fréquentes concernant le lait de chamelle demeurent la pasteurisation et la fermentation. Toutefois, l'originalité de ce créneau est la fabrication du fromage, des crèmes glacées et des yaourts à base de lait de chamelle, comme l'a montré une entreprise qui s'est lancée, il y a quelques années, dans la fabrication des dérivés du lait de chamelle dans la wilaya d'El-Oued. Mme Aouachria nous expliquera que "l'histoire du fromage de chamelle est très récente. Ce lait pauvre en caséines n'est pas traditionnellement transformé en fromage, même chez les pasteurs chameliers d'Afrique ou d'Asie. Pour cause, la concentration en caséines kappa du lait de chamelle n'est que de 3% des protéines du lait contre 13% dans le lait de vache, mais la mise récente sur le marché d'une chymozyme cameline, une présure recombinante spécifique du dromadaire, élaborée, puis synthétisée industriellement, a changé la donne. Par conséquent, cette présure a permis de tester de nombreux ferments pour obtenir des fromages goûteux, tels que halloumi, mozzarella, feta ou saint-paulin au lait de chamelle. Ces essais réalisés semblent indiquer que la coagulation est plus difficile avec du lait pasteurisé. Il faut donc faire des fromages au lait cru, ce qui accentue la nécessité de l'hygiène". Par ailleurs, pour des raisons de santé publique, il est important de veiller à la qualité de ces produits, organoleptiques, certes, pour éviter les risques de fraude, mais aussi les risques microbiologiques, en se focalisant sur le respect d'un certain nombre de règles d'hygiène. Selon la vétérinaire, "le principal danger est lié à la présence de microbes pathogènes pour l'homme. Ces agents pathogènes proviennent de l'animal ou de contaminations postérieures à la traite. Le problème particulier du lait de chamelle est qu'il se consomme cru. La plupart des consommateurs ne chauffent pas le lait de chamelle, du fait que ces derniers croient en ses nombreuses vertus médicinales qui ne sont efficientes que si on le consomme sans traitement thermique. Il est donc important que ce lait soit particulièrement sain". Elle poursuit : "D'autres agents infectieux en provenance de l'environnement comme ceux qui sont sur la peau de l'animal au moment de la traite, sur la peau du trayeur, sur les vêtements sales, sur les récipients de traite et de stockage, sur les déjections animales, voire dans l'eau de nettoyage peuvent aussi constituer un danger sur la santé du consommateur." Enfin, une bonne valorisation du lait de chamelle passe indéniablement par une meilleure hygiène à toutes les étapes, "de la calebasse à la tasse". De même, elle doit devenir une habitude, une quasi-obsession de tous les jours dans la mise en œuvre des bonnes pratiques d'hygiène. Ammar DAFEUR