Après plus de dix jours de flambée des prix des légumes, fruits et viandes, le ministre du Commerce, Saïd Djellab, au cours de sa visite, mardi dernier, à Bouira, a reconnu que le gouvernement n'arrive pas à contenir la hausse des prix. Il a imputé cette situation à l'anarchie sur les marchés et à la spéculation. Des phénomènes que l'Exécutif est censé avoir jugulés. Ce ton plus réaliste tranche avec ses propos rassurants tenus le premier jour à la veille du Ramadhan, lors de sa virée dans un marché de gros dans une banlieue de la capitale. Une assurance affichée également les jours suivants. "Les prix vont se stabiliser", avait-il assuré. Mais il s'avère que Saïd Djellab ignore la réalité du terrain. "à part la hausse des prix de la tomate et de la courgette, les prix des autres légumes restent raisonnables", avait-il affirmé au début du Ramadhan, alors que sur les différents marchés, la carotte était cédée à 120 dinars, la salade à 150 dinars, soit une augmentation entre 50 à 100%. Cette déclaration était d'autant plus surprenante que le ministre avait annoncé le lancement au cours du Ramadhan d'un système de surveillance des prix qui permettrait à son département de réagir en cas de hausses importantes des prix. Ni les marchés de proximité, d'ailleurs en nombre très insuffisant, ni son système de surveillance n'ont pu remédier à la hausse de la mercuriale durant le mois sacrée et même avant. Les mesures phares du gouvernement pour juguler la flambée des prix n'ont pas empêché les augmentations exagérées des prix des fruits et légumes pendant les dix premiers jours du Ramadhan. En fait, il s'agit d'une anarchie totale sur le marché. Jamais le diktat des marchands et des intermédiaires n'a été aussi puissant, n'a prévalu autant. Jamais la spéculation n'a atteint les proportions qu'on lui a connues durant les premiers quinze jours du Ramadhan. Autre exemple de l'impuissance du gouvernement à maîtriser le marché : la flambée des prix de la viande rouge et du poulet pendant les dix premiers jours du Ramadhan. Le ministre du Commerce, au cours de cette même visite dans la wilaya de Bouira, a reconnu que les prix de la viande rouge (1 500 dinars pour la viande ovine) et du poulet (340 dinars le kilogramme) pendant ces dix premiers jours duRamadhan sont exagérés. Il a annoncé l'ouverture d'une enquête sur cette flambée des prix des viandes. La solution, selon lui, pour mettre fin à cette anarchie sur nos marchés serait de recourir à la grande distribution. Ce que le ministre du Commerce oublie, c'est que les centres commerciaux aux standards internationaux ne dépassent pas la dizaine en Algérie et que les promoteurs intéressés éprouvent de grosses difficultés (accès au foncier, aux crédits, entraves administratives) à réaliser des chaînes d'hypermarchés. Donc, pour avoir un nombre suffisant de grandes surfaces de distribution à travers le territoire national et pour pouvoir influer sur les prix, il faudrait cinq à dix ans minimum. Cette incapacité à réguler le marché a également été avouée par le ministre de l'Agriculture qui peine toujours à endiguer la pénurie de lait en sachet. A Sétif, il a rappelé l'obligation faite aux distributeurs de se conformer aux cahiers des charges. Un rappel qui risque d'être vain, comme l'ont été ceux nombreux qui ont été formulés. Les mêmes échecs ont été notés en matière de lutte contre l'informel. Le gouvernement a essayé plusieurs formules mais aucune ne s'est avérée judicieuse. Ainsi, l'impuissance du gouvernement à juguler ces flambées des prix a pour conséquence de provoquer une nouvelle saignée de la bourse des ménages, un impact négatif sur le pouvoir d'achat des citoyens déjà mis à rude épreuve par la dévaluation du dinar et les conséquences des restrictions aux importations. Jusqu'à quand le contribuable peut-il accepter une telle érosion de son pouvoir d'achat ? K. Remouche