Le train des réformes peine à quitter la gare, alors que le pays reste confronté à des défis importants. à l'heure où les positions financières internes et externes du pays vont en se fragilisant, le gouvernement se permet le luxe de remettre au frigo l'essentiel des réformes économiques et budgétaires sur lesquels reposent les espoirs de sortie de crise. La multiplication des revirements et des remises en cause de certaines réformes plombe l'action économique au profit d'un agenda politique dont l'événement majeur n'est autre que l'élection présidentielle de 2019. Abandon de la décision d'ouvrir le capital des entreprises publiques à l'actionnariat privé, sempiternelles tergiversations autour du projet de réforme des subventions, ajournement du projet de modernisation des outils de politique monétaire, des banques et du marché financier... le train de réformes peine à quitter sa gare, alors que le pays reste confronté à des défis importants. Signe de cet atermoiement qui n'en finit pas, le Premier ministre et le ministre des Finances se sont adonnés à un échange vif autour de l'agenda de mise en œuvre des réformes des subventions. Selon nos sources, plusieurs départements ministériels, épaulés par des experts de la Banque mondiale, travaillaient depuis près d'une année déjà sur la refonte de l'action sociale de l'Etat au profit d'un système de transfert monétaire au bénéfice des démunis. Les premiers résultats de ce travail devaient être annoncés en février dernier, selon une source proche du ministère des Finances, mais la communication a été renvoyée sine die pour des raisons — jusqu'ici — inexpliquées. Entérinés par la charte sociétale signée le 23 décembre 2017 par le gouvernement et ses partenaires sociaux, les partenariats publics-privés et la vente de certains actifs encombrants allaient subir le même sort que le projet de refonte des subventions. "Plus personne n'en parle. Plus personne ne veut y toucher et/ou signer quoi que ce soit", témoigne un patron, un des signataires de ladite charte, contacté par Liberté. Pourtant, le gouvernement Ouyahia allait même engager un audit sur les entreprises publiques économiques avant qu'il ne se retire sur l'Aventin, parasité par un FLN "omniprésent" qui ne s'est pas gêné de convoquer, le 3 janvier 2018, une tripartite parallèle dédiée, dit-on, à mettre en garde un Ahmed Ouyahia qu'on qualifiait déjà de "présidentiable". Le Premier ministre, auquel l'on prêtait des ambitions présidentielles, allait être à nouveau désavoué, notamment dans ses tentatives, tantôt d'encadrer les transactions du commerce extérieur, tantôt de remettre de l'ordre dans l'activité de l'assemblage automobile. Ces guéguerres politiques justifient en partie le maintien en l'état de la situation économique, quitte à appuyer davantage sur le champignon de la dette. La planche à billets s'érige ainsi en unique alternative en attendant que les projets politiques de 2019 puissent aboutir. Le bémol : les besoins pour le reste de l'exercice et du premier semestre de 2019 risquent de se révéler coûteux, ce qui fait dire à certains analystes que le chemin du FMI serait alors inévitable. Même le ministre des Finances n'a pas écarté l'éventualité d'un retour à l'endettement extérieur dès la seconde moitié de 2019. Dans son dernier rapport sur l'Algérie, le Fonds monétaire international (FMI) avait même annoncé que le gouvernement entend reprendre la consolidation budgétaire à compter de 2019. L'augmentation des recettes fiscales non pétrolières, à travers l'élargissement de l'assiette fiscale et l'amélioration de la collecte de l'impôt, ainsi que la réduction des dépenses courantes figurent au menu de cette stratégie de consolidation budgétaire. En un mot, les sujets qui fâchent devraient refaire surface dès la seconde moitié de 2019. D'ici là, le pouvoir politique aura probablement réglé les affaires de succession qui ont relégué au second plan toutes les questions d'ordre économique. Ali Titouche