Avantages financiers, immunité et, parfois impunité ; pour certains cadres politiques, la présence au Parlement ne vaut que par les écarts qui peuvent en découler. C'est le cas de certains parlementaires, issus essentiellement des partis du pouvoir, qui ne connaissent aucune limite. Ils se servent des "attributs" du Parlement même après la fin de leur mandat. Très controversés jusqu'au sein de leur parti, Bahaeddine Tliba et Mohamed Djemaï, deux députés du FLN, illustrent bien cette incurie. Les deux hommes ont connu une ascension fulgurante durant la présence d'Abdelaziz Belkhadem et d'Amar Saâdani à la tête du FLN. Leur promotion a tellement été rapide que Tliba est parvenu à suivre son collègue de Tébessa jusqu'à la vice-présidence de l'APN en seulement quelques mois. Le poste de vice-président du troisième personnage de l'Etat est prestigieux. Il donne du pouvoir et des avantages. Sauf que les deux parlementaires sont des hommes d'affaires prospères. Ils possèdent d'interminables listes d'entreprises et de biens dont le mode d'acquisition reste toujours soumis à caution. Durant la période où Djemaï était vice-président de l'APN, puis président du groupe parlementaire du FLN, il bénéficiait, comme tous ses semblables, de voitures de service avec chauffeur. Son collègue d'Annaba a eu les mêmes privilèges. Mais une fois leurs fonctions arrivées à terme, ils devaient restituer ces véhicules au parc de l'Assemblée populaire nationale. Que nenni ! Les deux hommes continuent d'utiliser les Volkswagen Passat de l'APN, avec chauffeur, des années après leur retrait des organes de l'Assemblée. Les rappels à l'ordre de l'administration de l'APN, de la chefferie du groupe FLN et les écrits de la presse n'ont rien donné. Pis encore, Bahaeddine Tliba "emporte avec lui deux véhicules de l'APN" avec deux chauffeurs, nous a indiqué une source de la Chambre basse. Comble de l'ironie, c'est que le député n'est "jamais monté dans ces voitures" qui lui servent juste de "coupe-fil" pour pouvoir passer sans encombres les barrages routiers des services de sécurité. Tliba, tout comme Djemaï, utilise ses propres véhicules. Les voitures de l'APN ne servent donc que comme faire-valoir, un couloir vers plus d'impunité. Les deux députés du FLN ne sont pas les seuls à abuser des biens de l'APN. Une source parlementaire raconte que l'administration de l'Assemblée n'a récupéré la voiture de fonction de Khalida Toumi que des années après que cette dernière eut quitté ses fonctions de ministre. L'ancienne ministre de la Culture était députée de 1997 à 2002. Abdelhamid Si-Affif, député FLN de Mostaganem et actuel président de la Commission des affaires étrangères, avait également mis du temps à restituer la voiture de fonction qu'on lui avait attribuée. Les abus dans l'utilisation du matériel de l'APN ne se limitent pas aux députés. Ainsi, le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbes, qui occupe accessoirement les fonctions de vice-président du Conseil de la nation, roule avec une Volkswagen Passat de l'APN. Mieux, Saïd Bouhadja, le président de la Chambre basse, a "offert" cette voiture à son chef, payée avec l'argent de l'APN donc du contribuable, avec son chauffeur, payé, lui aussi, avec les deniers publics. Selon des sources de l'APN, ces pratiques ont commencé depuis au moins une quinzaine d'années. "Du temps où Rabah Bitat était président de l'APN, aucun écart n'était toléré. Il descendait lui-même jusqu'au parking pour enlever les clefs de voitures à ceux qui en abusaient. Karim Younès avait tenté de faire la même chose. Il avait rencontré une forte résistance. Depuis, les choses s'aggravent à chaque nouvelle législature !". Ali Boukhlef