Décrochage scolaire, chômage, emplois peu qualifiés, bas salaires, absence de couverture sociale... Au Maroc, les jeunes de 15-34 ans, qui représentent un tiers de la population, sont les grands oubliés de la croissance, selon un rapport officiel. Le Conseil économique, social et environnemental du Maroc (CESE) s'alarme du fossé vertigineux qui sépare les 11 millions de jeunes Marocains du reste de la population et du défi majeur que pose leur réinsertion dans la société, qui doit passer par l'emploi, affirme l'organisme dans un rapport publié cette semaine. Les chiffres sont préoccupants : le décrochage scolaire concerne deux jeunes Marocains sur trois, le taux de chômage avoisine les 20%, la moitié de ceux qui travaillent occupent des postes à bas salaires et 75% n'ont aucune couverture sociale, dans un pays porté par une croissance favorable de 4% (contre 1,2% en 2016). La situation est d'autant plus difficile pour les filles ou pour les jeunes ayant un faible niveau d'instruction et qui vivent en milieu rural, indique le rapport, soulignant "l'urgente nécessité" de mettre en place une stratégie adaptée. L'abandon des études, le chômage et l'absence de structures facilitant la participation à la vie sociale sont autant de facteurs qui contribuent à l'isolement et à un sentiment de frustration, exposant les jeunes Marocains à la délinquance, la criminalité et l'extrémisme et à la tentation de quitter le pays dans l'espoir d'une vie meilleure, analyse le document. Selon le CESE, un jeune sur cinq souffre par ailleurs de troubles psychologiques. L'organisme s'inquiète, sans donner de chiffres, de fléaux comme l'addiction aux drogues, le tabagisme et le suicide, mais aussi des dérives qu'impliquent les réseaux sociaux. Dans un pays où 46% de la population est née après 1993 - date d'apparition d'Internet - la jeunesse va puiser son système de valeurs dans un spectre très large, au-delà des frontières familiales ou territoriales, ce qui, chez ceux qui refusent le modèle de modernité inspirée de l'Occident, implique un repli sur soi qui peut aller jusqu'à la radicalisation religieuse. La marginalisation des jeunes se reflète également dans leur faible implication sociale : 82% d'entre eux n'exercent aucune activité physique ou culturelle, 72% de leur temps est consacré à des activités non productives de bien-être social, ceux qui adhèrent à un parti politique ou à un syndicat sont de 1% seulement. R. I./Agences