Plus de 11 millions de jeunes marocains (15-34 ans) sont livrés à eux-mêmes et n'ont pas accès à l'emploi, à la formation et à aucune couverture sociale, ont rapporté vendredi des médias marocains citant un rapport officiel émanant du Conseil économique, social et environnemental du Maroc. Cette frange oubliée représente un tiers de la population marocaine, a indiqué le site d'actualités de la chaine de télévision 2M, soulignant que le "rapport est sans appel". Le document s'est alarmé, en effet, sur le fossé "vertigineux" qui sépare les jeunes marocains du reste de la population et du "défi majeur" que pose leur réinsertion dans la société marocaine. Le rapport du Conseil économique et social marocain, élaboré suite à une saisine de la chambre des conseillers et à la mise en place d'une commission ad hoc, a précisé également que l'échec scolaire concerne deux jeunes marocains sur trois et que le taux de chômage avoisine les 20%, alors que la moitié de ceux qui travaillent occupent des postes à bas salaires et 75% n'ont aucune couverture sociale. "La situation est d'autant plus difficile pour les filles ou pour les jeunes ayant un faible niveau d'instruction et qui vivent en milieu rural", a mentionné le même rapport, appelant à "l'urgente nécessité" de mettre en place une "solution adaptée". "L'abandon des études, le chômage et l'absence de structures facilitant la participation à la vie sociale sont autant de facteurs qui contribuent à l'isolement et à un sentiment de frustration", a relevé le Conseil. Relevant que cette situation expose les jeunes marocains "à la délinquance, la criminalité, l'extrémisme et l'immigration", le document a fait savoir qu'un jeune sur cinq souffre aussi de "troubles psychologiques". L'organisme s'alerte sur le fait que les jeunes marocains s'adonnent aux fléaux sociaux, comme l'addiction aux drogues, le tabagisme et le suicide et d'autres dérives qu'impliquent les réseaux sociaux. "La marginalisation des jeunes se reflète également dans leur faible implication sociale, dont 82% d'entre eux n'exercent aucune activité physique ou culturelle, 72% de leur temps est consacré à des "activités non productives de bien-être social, seulement 1% adhèrent à un parti politique ou à un syndicat", a souligné le Conseil économique et social marocain, interpellant les autorités sur les graves risques de "radicalisation" des jeunes marocains. Le rapport en question vient appuyer les revendications des militants des mouvements de contestation rifains et de boycott des produits chers qui avaient ébranlé le Royaume marocain depuis ces dernières années. Le mouvement populaire du Rif (le Hirak) qui avait débuté en octobre 2016 avait dénoncé les conditions de vie des populations rifaines notamment d'Al Hoceima et de Nador, ainsi que d'autres villes et villages marocains. Face à ce mouvement pacifique réclamant l'amélioration des infrastructures et l'accès aux services publics, ainsi qu'à une éducation de qualité, les autorités avaient riposté par la répression et l'arrestation des principaux animateurs de la contestation. Ils sont 53 militants rifains lourdement condamnés à des peines allant jusqu'à 20 ans de prison ferme pour avoir initié ces actions de protestation, suscitant l'indignation et la colère au Maroc et à l'étranger. La campagne de boycott des produits chers lancé le mois d'avril dernier et qui avait eu un impact considérable sur les entreprises, est révélateur aussi, selon des observateurs marocains, du malaise et d'un climat social tendu, notamment chez la frange juvénile n'ayant pas les moyens de faire face à leurs besoins quotidiens.