L'établissement est souvent au cœur de scandales dus aux défaillances et au manque de personnel qualifié. L'EPH de Tamanrasset fait encore parler de lui. Après l'affaire du migrant sans papiers présentant une urgence urologique (torsion des testicules) qui a été victime d'une ségrégation raciale et de pratiques perverses de la part du personnel des admissions, à peine étouffée, voilà qu'une nouvelle affaire éclate au grand jour dans cet établissement qui peut être de toute vocation, sauf hospitalière. Une femme souffrant d'un problème néphrologique a trouvé la mort en raison de l'absence d'un spécialiste en chirurgie vasculaire pour lui faire une banale échographie de la fistule. La victime, Rabia Ayech, âgée de 39 ans, admise vendredi dernier, à l'hôpital pour éclatement de la fistule artérioveineuse, a fait les frais d'une négligence patente. Nous nous sommes déplacés jusqu'à l'EPH pour avoir de plus amples informations sur cette affaire. Le constat dressé par les médecins interrogés à ce titre est des plus atterrants. Un tableau sombre a été ainsi brossé par les blouses blanches qui tiennent à dénoncer "la mauvaise gestion dans cet hôpital où l'on dénombre des morts à cause de l'absence de spécialistes qui n'existent que sur l'état collectif de la paie". Pas de pneumologue, ni de neurologue, ni encore de diabéto-endocrinologue. Le seul cardiologue de l'hôpital, en congé depuis un moment, est démissionnaire. "L'hôpital est livré aux amateurs et aux supermédecins. Le pire est que les conditions socioprofessionnelles dans lesquelles évoluent les médecins, particulièrement les spécialistes, sont lamentables. La parole du médecin n'a aucune considération dans cet établissement. Même chose pour les malades qui sont traités au même titre que des animaux. La négligence est une marque déposée céans", se lamente un spécialiste. Et son collègue de renchérir : "Le bloc des urgences est une catastrophe. Une étable qui fait de certains généralistes des supermédecins eu égard aux efforts qu'ils fournissent et à la pression qu'ils subissent au quotidien. Ce service, qui devrait servir de vitrine à l'EPH, donne l'image d'une santé gravement malade, mais surtout d'un secteur en mal de ses dirigeants." Les témoignages ne manquent pas dans ce sens puisqu'un autre médecin a parlé avec force détails du manque flagrant des effectifs et de matériel dans les services-clés qui ne disposent même pas de sources d'oxygène ni de prises d'alimentation en électricité. "Pour le besoin de réanimation, le médecin spécialiste est souvent contraint de perdre son temps à chercher une prise où il peut brancher son appareil. C'est grave comme situation", peste un autre médecin. Au service d'hémodialyse, le constat est on ne peut plus accablant. Sur les douze générateurs disponibles, six sont hors service au grand dam des 75 patients chroniques suivis dans ce centre. Avec deux généralistes et 12 infirmiers scindés en deux groupes, le service d'hémodialyse de l'EPH, accusant un manque flagrant en effectifs, "ne répond à aucune norme", maugrée un néphrologue. Certes, un nouveau centre d'hémodialyse a été ouvert à la cité Adriane. Cependant, il fonctionne avec huit générateurs alimentés insuffisamment en eau. Sur place, nous avons appris qu'un rapport détaillé a été adressé au wali par le biais du directeur de l'EPH. La réaction du wali ne s'est pas fait attendre. Une commission d'inspection, présidée par son chef de cabinet, a été dépêchée à l'hôpital pour s'enquérir de la situation, selon une source auprès de la wilaya. Une autre commission a également été engagée par le P/APW de Tamanrasset pour établir un compte rendu exhaustif de la situation et relever les carences ainsi que les problèmes dont souffrent les malades. Toutefois, les deux commissions n'ont fait que vérifier l'origine des interminables doléances du personnel médical et paramédical et jaugé la souffrance des malades. RABAH KARECHE