Plus de 17 ans après la mise en place d'un arsenal juridique pour promouvoir l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap, le problème de l'employabilité de cette frange de la société reste posé. La loi 02-09 du 8 mai 2002 — relative à la protection des personnes handicapées — faisant obligation aux employeurs de consacrer au moins 1% de l'effectif global aux personnes aux besoins spécifiques, ne semble être observée ni par le patronat privé et encore moins par le secteur public et les institutions. Les handicapés sont victimes des choix discriminatoires qui empêchent leur intégration en milieu professionnel. Ce constat affligeant a été partagé, hier, par Ghania Eddalia, ministre de la Solidarité nationale, à l'occasion de la présentation des résultats du jumelage institutionnel Algérie-France, dans le cadre du programme d'appui de l'Union européenne, lancé en 2017, pour la mise en œuvre d'une approche globale pour la promotion du droit de travail des handicapés. Lors d'un point de presse, en marge de la rencontre organisée à l'Ecole de la sécurité sociale, la ministre a reconnu que nombreux sont les employeurs qui réfusent d'embaucher des personnes aux besoins spécifiques, même si elles sont compétentes et dont l'invalidité ne nuit pas au poste à pourvoir. Les chiffres d'embauche qu'elle a présentés sont dérisoires et confirment l'exclusion sociale et professionnelle de cette catégorie. "L'intégration professionnelle de cette catégorie de la société reste timide dans certaines institutions de la République, voire invraisemblable dans d'autres organismes. À l'exception de notre département qui compte dans ses effectifs 3,9% de personnes en situation de handicap, suivi de celui des Affaires religieuses avec un taux de 1,29%, les autres départements ministériels sont à moins de 1% du quota d'emplois réservés aux handicapés", déplorera Mme Eddalia qui rappellera que "tout le monde est concerné par l'insertion des personnes aux besoins spécifiques. Nous sommes en train de travailler sur la révision et l'actualisation des dispositions de la loi n° 02-09, et ce, afin de combler les lacunes et de remédier aux injustices enregistrées". Sur sa lancée, elle annoncera que "dans le nouveau texte, des sanctions financières sont prévues contre les employeurs réfractaires". Ce qu'il faut retenir du programme de ce jumelage c'est l'élaboration d'une étude pilote sur l'insertion sociale des personnes aux besoins spécifiques. Il s'agit, selon Mourad Benamzal, directeur central au ministère, d'une enquête quantitative qui a touché un échantillon de 2 386 handicapés en âge de travailler, dans les wilayas de Tizi Ouzou et de Tipasa. Les chiffres ont permis d'avoir, pour la première fois en Algérie, une radioscopie détaillée sur les difficultés rencontrées par cette catégorie de la société. Plus de 50% des femmes en situation de handicap interviewées ne sont jamais allées à l'école. Plus de 35% des hommes aux besoins spécifiques ne disposent d'aucun cursus scolaire. Ceux qui n'ont fait que le primaire représentent 33% alors que ceux qui ont le niveau secondaire ne dépassent pas les 7%. Ils ne sont enfin que 3% à avoir le niveau universitaire. Il ressort de cette étude menée sous la direction d'experts français qu'une seule personne sur 11 en situation de handicap est embauchée. Hanafi H.