Une marée humaine se forme devant l'entrée de la wilaya avant de se disperser dans le calme quelques dizaines de minutes plus tard. Ce fut tout simplement impressionnant. Du jamais vu ! La marche contre le 5e mandat, hier, pour un deuxième vendredi consécutif, a drainé des dizaines de milliers de personnes. Une véritable déferlante humaine. Plus de 50 000 personnes, selon des estimations concordantes. Ceux qui misaient sur l'essoufflement de la mobilisation populaire contre le 5e mandat ont dû, ainsi, assister avec amertume à son amplification. à 13h, les premiers manifestants commençaient à se rassembler devant l'entrée du campus universitaire Hasnaoua, lieu traditionnel de départ des marches. Ils n'étaient qu'une poignée, essentiellement des étudiants, quelques militants du FFS et du RCD et des militants associatifs. Sur une large banderole déployée sur les lieux, on pouvait lire "Non au mandat de la honte". L'ambiance était terne, mais en moins de 20 minutes, tout a basculé. L'endroit est devenu noir de monde. Ils affluaient de partout, individuellement, par dizaines, voire par centaines. La marche s'ébranle alors avant même 14h, l'heure prévue de la marche. Le "la" est vite donné : "Echaâb Yourid isqat Enidham" (le peuple veut la chute du régime) est repris en chœur par la foule qui avait beaucoup de peine à avancer en raison du flux humain massif qui arrivait sur les lieux. "Ya Bouteflika, makache el-khamssa" scandaient certains, "Bouteflika dégage, FLN dégage" scandaient d'autres, "Echaâb la yourid Bouteflika oua Saïd" (le peuple ne veut ni Bouteflika ni Saïd), clamaient encore d'autres. Le premier carré de la marche a dépassé la placette du stade du 1er-novembre alors que les derniers carrés attendaient toujours que l'espace se libère pour pouvoir débuter la marche. Ce fut plus impressionnant encore lorsque, arrivés devant le CHU Nedir-Mohamed, les manifestants découvrent, avec joie, qu'une autre marche impressionnante venait dans l'autre sens. Les milliers de personnes que celle-ci comptaient se retournent. La marée humaine formée par ces deux marches réunies se dirige, alors, vers la place de l'Olivier en empruntant le boulevard Abane-Ramdane, appelé communément la Grande rue. Des centaines de banderoles et de pancartes sont visibles où sur certaines d'entre elles nous pouvions lire : "Pour un Etat civil", "Un seul héros : le peuple", "Non au royaume", "Pour le départ du système", "Non au 5e mandat de la honte", "Le peuple s'engage, système dégage", "Ni Syrie ni Libye", "Pour un changement pacifique et radical en Algérie". Au rond-point du centre-ville, une autre foule importante, constituée essentiellement de jeunes, arrivait encore en sens inverse et se rallie aussitôt à la marche sous les cris "Boudiaf khella wsaya, Chabiba rahi djaya". À 15h, la foule atteint l'entrée du siège de la sûreté de wilaya. "Pouvoir assassin !" scande la foule avec acharnement au nez des dizaines de policiers postés, sans casque ni bouclier sur l'escalier du siège. Un instant, le pire était à craindre, mais sans aucune intention d'en découdre, la foule rebrousse chemin et emprunte le même itinéraire du centre-ville pour se diriger, cette fois-ci, vers le siège de la wilaya. À 16h, une marée humaine se forme devant l'entrée de la wilaya avant de se disperser dans le calme quelques dizaines de minutes plus tard. Samir LESLOUS