J'ai appris avec consternation la provocation dont a été victime Saïd Sadi ce vendredi à Bgayet. Mon intervention ne vise pas à rappeler les relations qui nous lient ni son parcours dont j'ai partagé les plus dures et les plus valeureuses périodes de notre vie de militants. En dévoilant publiquement les manœuvres de la police politique, il savait quels types de réactions pouvaient provoquer ses dernières contributions. Ce n'est donc pas l'amitié qui inspire d'abord mon écrit mais la volonté et le devoir d'alerter notre jeunesse, c'est-à-dire nos enfants. Ce qu'il y a de grave dans cette opération, c'est que le pouvoir ait pu croire possible et permis de faire commettre sa forfaiture à Bgayet et au moment où le peuple tente de retrouver ses repères. En ciblant Saïd Sadi, le régime a voulu essentiellement nier le message et le parcours d'Avril 80, source qui a irrigué les racines rabougries de notre Histoire niée et ouvert les chemins de la dignité que revendiquent, aujourd'hui, nos compatriotes avec vitalité et dans une belle communion. La liberté n'est pas une averse ; elle n'est pas spontanée et ne tombe pas du ciel. Dans toutes les communautés souveraines, il y a des interdits qu'il faut savoir sacraliser si on veut préserver les chances qui façonnent les grands avenirs. Et l'interdit vient d'être commis sous nos yeux et devant nos portes. La volonté du régime était de guillotiner une symbolique qui hante les imposteurs de nos vérités en isolant les nouvelles générations de leurs aînés. Ce qui me permet de faire le lien avec l'actualité puisque, plus que dans d'autres phases, les liens des événements se voient mieux quand la vie politique s'accélère. Lors de mon dernier passage au Forum de Liberté, je disais que "les foules seules n'ont jamais fait les révolutions". Les menaces qui pèsent sur le mouvement citoyen actuel sont justement celles qui poussent au rejet des élites pour totémiser un peuple anonyme. C'est ainsi que procèdent tous les pouvoirs liberticides pour éloigner les masses, sans mémoire ni objectifs, de leur destin. C'est pour cela que la première et vraie victime de la cabale de Bgayet est d'abord la jeunesse. C'est aussi et surtout pour cela que ce qui a été perpétré ce vendredi ne doit être ni oublié ni banalisé. Chacun de nous est concerné. Du moins pour ceux qui ont conçu, porté et perpétué le message d'Avril 80. Mouloud Lounaouci