La dernière sortie de chef d'état-major, vice-ministre de la Défense nationale, le général de corps d'armée Ahmed Gaïd Salah, n'a pas laissé de marbre des militants de la démocratie. Le discours du chef d'état-major a ainsi suscité des réactions aussi nombreuses que diverses, mais elles tendent, principalement, à lui rappeler sa mission constitutionnelle qui est celle de se concentrer sur la sécurité du pays et de ne pas s'immiscer dans les affaires politiques. Djamel Zenati, militant politique, a souligné que "l'idée de séparer le politique du militaire a suscité un débat globalement très pertinent. Mais s'arrêter au principe de séparation ne répond pas à toute la problématique", estimant, à l'occasion, qu'en situation démocratique, "le militaire ne constitue pas un pouvoir". Il explique que "l'armée est une institution de l'Etat. Elle ne décide pas de la politique de défense nationale ni même de son budget. Elle est totalement subordonnée au pouvoir politique, seul à bénéficier d'un mandat populaire pour décider au nom de la Nation". "La première conséquence est que le ministre de la Défense ne peut, en aucun cas, être un militaire. Et le cumul du poste de ministre de la Défense avec celui de chef d'état-major est contraire à l'esprit démocratique", a-t-il relevé. Revenant au principe de la primauté du politique sur le militaire, il a souligné que cela "n'est pas de la séparation". "La primauté est historiquement déterminée par une contingence particulière, à savoir la guerre contre la colonisation", explique-t-il encore, ajoutant que cette séparation "n'est plus pertinente" vu que "le pays a recouvré son indépendance". "Toutefois, indique-t-il, le principe de séparation, dans ce cas précis, est une adaptation, voire un approfondissement du principe de la primauté. Le lien entre les deux principes existe bel et bien." Me Mokrane Aït Larbi n'a, lui aussi, pas laissé passer cette occasion pour apporter une réponse au vice-ministre de la Défense. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, il a estimé que concernant l'indépendance de la justice, "aucune institution de l'Etat n'a le droit d'y s'immiscer, même si c'est l'état-major de l'armée". L'avocat et défenseur des droits de l'Homme a ajouté que le rôle d'Ahmed Gaïd Salah, vice-ministre de la Défense, n'a rien à voir avec la justice, mais se résume, explique-t-il "à poursuivre les militaires impliqués devant la justice militaire et selon le droit militaire" et "n'a aucun droit de s'immiscer dans la justice". Me Aït Larbi a souligné que le sit-in des magistrats prévu, aujourd'hui, devant le ministère de la Justice "est à encourager", car "la démocratie passe inévitablement par une justice indépendante". Il a également insisté sur le fait que "réduire" la Constitution à son article 102, revient à maintenir le système dans sa globalité alors que le peuple réclame son départ. Me Mustapha Bouchachi, dans une réponse à Ahmed Gaïd Salah, a estimé que les revendications du peuple "sont réalisables". Elles le sont d'autant plus, ajoute-t-il, que "toutes les périodes de transition connues dans le monde ont abouti sans les hommes et les symboles des systèmes contestés". L'avocat s'est demandé "si l'état-major est avec le peuple avec l'activation de l'article 7 de la Constitution pour aller vers une période de transition ou s'il est avec les résidus du système ?" Il a rappelé les différentes prises de position du chef d'état-major depuis le début du soulèvement. Mohamed Mouloudj