Selon des juristes au fait du dossier, les prérogatives et les procédures sur lesquelles seront basées les missions exactes des administrateurs devront être définies dans les mêmes ordonnances rendues par le juge lors de leur désignation. La mise sous administration d'experts financiers agréés des entreprises des groupes privés Haddad, Tahkout et Kouninef suscite inquiétudes et appréhensions quant aux rôles et prérogatives qui seront dévolus aux administrateurs désignés par les autorités judiciaires. Selon des spécialistes en droit, le flou et la confusion entourent, en effet, la question des attributions et pouvoirs dont seront dotés ces administrateurs, sachant que leur mission est d'assurer la continuité de gestion de sociétés à capitaux privés, non concernées directement par les procédures judiciaires dont font actuellement l'objet leurs principaux actionnaires. Ainsi, nous affirment des juristes au fait de ces dossiers, "le code de commerce ne précise pas les missions et les prérogatives de l'administrateur désigné que lorsqu'il s'agit de cas d'entreprises confrontées à des difficultés économiques et financières et non dans le cas de sociétés privées viables dont les propriétaires sont poursuivis en justice". Selon nos interlocuteurs, le juge enquêteur, qui a rendu jeudi dernier les ordonnances de désignation d'administrateurs pour gérer les groupes Haddad, Tahkout et Kouninef, se serait surtout appuyé sur le code de procédure pénale, sans pour autant définir précisément les attributions qui seront dévolues à ces administrateurs et les limites qui leur seront fixées quant aux décisions et actes de gestion qu'ils seront appelés à mettre en œuvre dans le cadre de l'exercice de leurs missions. Les prérogatives et les procédures sur lesquelles sera basé le rôle de ces administrateurs devront vraisemblablement être définies dans les mêmes ordonnances rendues par le juge, faute d'une autre référence légale, estiment en définitive les mêmes juristes. À rappeler que selon le communiqué du procureur général près la cour d'Alger, rendu public avant-hier, le juge enquêteur, saisi des dossiers des sociétés appartenant aux groupes Haddad, Tahkout et Kouninef, "a rendu le 22 août 2019 des ordonnances de désignation de trois administrateurs, experts financiers agréés, pour la gestion de ces sociétés", dont les propriétaires sont actuellement en détention provisoire pour des accusations liées à des faits de corruption. Ces ordonnances, est-il précisé dans le même communiqué, interviennent "dans le cadre des enquêtes judiciaires ouvertes à l'encontre de certains hommes d'affaires, propriétaires de sociétés, dont les groupes Haddad, Tahkout et Kouninef, et dans un souci d'assurer la pérennité des activités desdites sociétés et de leur permettre de préserver les postes d'emploi et d'honorer leurs engagements envers les tiers". Aussi, est-il ajouté, les administrateurs désignés ont été chargés de "la gestion des entreprises en question conformément aux dispositions du code de commerce et du code de procédure pénale". À noter que selon des sources proches des sociétés concernées par ces mesures, les administrateurs désignés auraient entamé leur fonction depuis hier, tandis que les salariés et les cadres de ces mêmes entreprises nourrissent de sérieuses inquiétudes quant aux actes de gestion et aux décisions qui pourraient être prises à l'avenir et qui pourraient engager directement l'outil de production et les postes d'emploi au sein de ces groupes.