Les pouvoirs publics ont tenté, en 2017, d'introduire un impôt sur la fortune dans le projet de loi de finances 2018, mais cette taxe a été retirée par la commission des finances de l'APN. Le gouvernement revient à la charge et veut taxer "les riches" et satisfaire la demande de justice fiscale formulée par l'opinion publique. La première mouture de l'avant-projet de loi de finances 2020, présentée mercredi 11 septembre 2019 par le ministre des Finances, lors de la réunion du gouvernement, prévoit "le renforcement des impôts et des taxes sur la fortune et les biens suivant les indicateurs de fortune mobilière et immobilière en vue d'assurer la répartition idoine des charges fiscales entre tous les citoyens". Le communiqué du gouvernement ne donne aucune précision sur les biens concernés ni sur le niveau de taxation. Les pouvoirs publics ont tenté, en 2017, d'introduire le même impôt dans le projet de loi de finances 2018, mais ils avaient essuyé un échec cuisant ; la taxe a été retirée par la commission des finances de l'APN. Le gouvernement avait proposé l'institution d'un impôt sur la fortune en définissant le type de patrimoine assujetti, le barème et la destination des recettes provenant de cet impôt. Dans l'exposé des motifs, les concepteurs du projet de loi de finances 2018 expliquent qu'un impôt sur le patrimoine avait été institué par la loi de finances de 1993. Mais durant la dernière décennie, une demande incessante a été exprimée par des parlementaires visant à instituer un impôt sur la fortune et ce, même si l'impôt sur le patrimoine existe. Du coup, le gouvernement a proposé de changer l'appellation "impôt sur le patrimoine" en "impôt sur la fortune" dans le but de "permettre à l'opinion publique de mieux assimiler cet impôt qui touche la classe riche". Les biens concernés sont essentiellement les biens immobiliers, les véhicules particuliers d'une cylindrée supérieure à 2 000 cm3 (essence) et de 2 200 cm3 (gasoil), les yachts et bateaux de plaisance, les chevaux de course, les avions de tourisme, les objets d'art estimés à plus de 500 000 DA, les bijoux et pierreries, or et métaux précieux, précise le projet de loi. En revanche, les habitations principales sont exclues de l'assiette de l'impôt sur la fortune. Quant au tarif de taxation, il varie entre 1% et 3,5% en fonction du montant du patrimoine. Contre toute attente, la commission des finances de l'APN a décidé de retirer l'article en question. Elle a jugé inutile d'introduire un impôt sur la fortune, dont la mise en application pourrait être problématique faute d'une administration fiscale moderne et de mécanisme d'évaluation de la fortune. Le gouvernement, lui-même, a constaté que "l'application de l'impôt sur le patrimoine se heurte à diverses difficultés caractérisées par la non-déclaration par les personnes soumises à l'ISP de leurs biens, notamment immobiliers et mobiliers, ce qui engendre des problèmes d'évaluation de ces biens par les services fiscaux et, par voie de conséquence, un faible rendement". De son côté, la Cour des comptes estime que les recettes en provenance de certains impôts et taxes, entre autres l'impôt sur le patrimoine, demeurent en deçà des attentes. Les raisons avancées sont liées aux difficultés rencontrées par les services des impôts dans la détermination de la matière imposable, au manque d'intervention chez les redevables et au recensement périodique. Certes, certains experts relèvent une tendance à la "patrimonialisation" des revenus au détriment de l'investissement productif, ce qui n'est pas une bonne chose. Cependant, selon l'ancien directeur général des impôts, avant l'application de l'impôt sur la fortune, les services des impôts devraient faire un travail sur le terrain pour identifier les personnes qui y seront assujetties. L'administration fiscale a-t-elle constitué, depuis, le fichier des personnes imposables ? Rien n'est moins sûr.