Attendu depuis quelques années, le nouvel album de Zedek Mouloud sera sur les étals la semaine prochaine. Dans cet entretien, l'artiste donne un avant-goût de son opus, évoque la situation en Algérie et ses projets à court terme, notamment le spectacle de Yennayer 2020 au Zénith de Paris. Liberté : Votre nouvel album est annoncé depuis quelque temps, quand est-ce qu'il sera sur les étals ? Zedek Mouloud : Le nouvel album est fin prêt. Il sera sur les étals concomitamment en Algérie et en France le 23 novembre. Je sais que mon public l'attend avec impatience et j'espère être à la hauteur de ses attentes. Un album de 14 chansons que j'ai intitulé Negh delmegh (j'ai fauté). Pouvez-vous nous en parler un peu plus sur les thèmes choisis ? J'avoue que j'ai toujours été éclectique durant ma carrière en termes de choix de mes textes. Cette variété implique d'ailleurs et avant tout l'exigence d'un public. La musique, ou la chanson, revêt une fonction éducative et didactique tout comme l'engagement artistique. Le public attend de moi plus de "maturité", ce qui exige de ma personne qu'une chanson d'amour, aussi belle soit-elle, doit transcender celle qui a été déjà écoutée. Ce qui est le cas aussi pour les chansons à caractère politique, culturel ou autre. Et j'aime bien ça, car le défi et le challenge sont des épreuves ataviques ancrées en moi. J'espère être toujours à la hauteur des aspirations d'un public très pressant. Que c'est dur d'être un chanteur engagé en Kabylie ! Cet album vient dans une période où le pays vit au rythme d'un soulèvement inédit. Quel regard portez-vous sur ce mouvement ? Je tenais à dire que ce mouvement n'est pas spontané, mais un processus de longs combats menés d'abord en Kabylie depuis 1963 qui ont fait plus de 500 morts, puis en 1980 avec des représailles contre les militants de la cause berbère, suivis des évènements d'octobre 1988 où l'armée a tiré à balles réelles sur des centaines de jeunes. En avril 2001, Bouteflika a ordonné de tirer 130 jeunes à mains nues pendant les évènements sanglants du Printemps noir. Aujourd'hui, nous vivons une période de l'histoire sans précédent. Les populations se sont soulevées à travers tout le territoire national. J'espère que c'est pour reprendre le cours de l'histoire qui leur a été confisquée par le clan d'Oujda. Il faudrait, à mon humble avis, passer à un autre mode d'action et ne pas se contenter de battre le pavé les mardis et les vendredis. Le folklore supplante parfois les véritables perspectives et les enjeux de cette révolution. Ce qui nous donne parfois le vertige du doute. Cet album sera suivi d'une tournée de promotion, notamment le Zénith de Yennayer. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ? Effectivement, pour la sortie de mon nouvel album, il y aura une vente-dédicace ici à Paris et une autre prochainement à Tizi Ouzou pour promouvoir ainsi le gala du Zénith que je considère comme une étape charnière de mon parcours artistique. Cette salle si prestigieuse a accueilli nombre d'artistes kabyles, dont Matoub Lounès. J'espère de tout cœur que le public et ceux qui ont le kabyle chevillé à l'âme et au corps répondront présent le 12 janvier 2020. Des retrouvailles que je veux de convivialité et d'osmose avec mon public que je ne cesse de remercier. Sinon, des spectacles en Algérie ? Sincèrement, il m'est difficile de me prononcer pour l'instant, et ce n'est pas l'envie qui me manque. Dès que je pourrais et que la situation le permettrait, c'est avec joie que j'irai à la rencontre de mon cher public en Algérie et ailleurs. Je dirais avec amertume, en paraphrasant Samuel Beckett dans la fragilité humaine de ses personnages : attendons alors Godot !