Les forces de l'ordre chiliennes ont mis en place une "politique pour punir" les manifestants au cours de la crise sociale qui secoue le pays depuis plus d'un mois, a dénoncé jeudi Amnesty International. "L'intention des forces de l'ordre chiliennes est claire : blesser ceux qui manifestent pour décourager le mouvement de protestation, y compris en arrivant à des extrêmes, en utilisant la torture et la violence sexuelle contre les manifestants", accuse l'ONG de défense des droits de l'homme dans des conclusions préliminaires à l'issue d'une visite dans le pays. Le gouvernement de Sebastian Piñera a "soutenu sa politique pour punir" les contestataires, a dénoncé Erika Guevara, directrice pour les Amériques d'Amnesty International, qui a documenté 23 cas de violations des droits humains dans le pays. Le mouvement social sans précédent qui a éclaté au Chili le 18 octobre a fait 22 morts, dont cinq après l'intervention des forces de sécurité, et plus de 2 000 blessés, dont plus de 200 grièvement touchés aux yeux. L'Institut national des droits humains (INDH), un organisme public, a déposé 384 plaintes pour des violations de ces droits commises par les forces de l'ordre contre les manifestants. Quelque 1 100 plaintes pour torture et mauvais traitements ont en outre été déposées au parquet et 70 dossiers d'agressions sexuelles commises par des représentants des forces de l'ordre sont en cours d'instruction. "Il ne s'agit pas de faits isolés et sporadiques, ils répondent à un modèle en ce qui concerne le type de violation (des droits des manifestants) et le modus operandi des policiers à travers le pays", écrit Amnesty. L'ONG critique également la décision du gouvernement de faire appel à l'armée au cours des neuf premiers jours de la crise, ce qui a eu des conséquences "catastrophiques" selon elle. De leur côté, les carabineros (police du pays) ont fait état de 1 600 agents blessés durant les protestations qui ont été marquées encore dans la nuit de jeudi à hier par de nouvelles violences, selon les médias locaux.