Il était déjà prévisible depuis plusieurs jours que la wilaya de Tizi Ouzou allait tourner le dos à la présidentielle, et c'est désormais chose faite. La participation n'a atteint qu'un maigre taux de 0,04%. La population s'est mobilisée massivement depuis les premières heures de jeudi pour faire avorter ce qu'elle a toujours qualifié de "simulacre d'élection". Cela a été réussi puisqu'en dépit de la farouche résistance opposée par les forces antiémeutes déployées en grand nombre devant les centres de vote, les habitants ont réussi à les fermer moins de deux heures après leur ouverture. Des rassemblements imposants ont été organisés, notamment devant les centres Kerrad-Rachid, Khodja-Khaled et Khamès-Ali, où les organisateurs ont fini par céder sous la pression populaire. Mais, même après la fermeture des bureaux de vote et l'annonce de l'arrêt du scrutin par l'Anie locale, les manifestants ont refusé de rentrer chez eux. Ils ont plutôt préféré organiser une marche au centre-ville. Une manifestation qui a malheureusement pris fin avec de violents affrontements, qui se sont poursuivis jusqu'à 3h du matin. À l'origine de cette violence, un rassemblement observé par plusieurs milliers de manifestants devant le siège de la wilaya où le premier dérapage a été enregistré. Des manifestants qui ont essayé d'accéder à l'intérieur de cette institution, ont été violemment repoussés par les forces antiémeutes par des tirs de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc, faisant plusieurs blessés, dont un dans un état grave. Une cinquantaine d'interpellations ont été opérées et plusieurs édifices publics incendiés, à l'image du siège de la daïra, d'une partie de la Maison de la culture et aussi d'un véhicule appartenant à la wilaya. Des émeutes que les habitués des marches du vendredi étaient unanimes à dénoncer, car convaincus qu'il s'agissait d'une provocation du pouvoir pour embraser la Kabylie dans le but de justifier l'échec de cette élection et aussi de mettre fin au caractère pacifique du mouvement populaire qui dérange les tenants du pouvoir. Après cette nuit de violence, le calme est revenu hier au chef-lieu de wilaya où les habitants ont organisé un volontariat afin d'effacer les stigmates d'une nuit fortement agitée. Par ce volontariat, les participants tenaient, disent-ils, à démontrer qu'ils sont contre la violence et qu'ils aspirent juste à un changement pacifique pour lequel ils disent être déterminés à poursuivre le combat avec le sourire. À noter que cet appel au nettoyage de la ville a été initié surtout par les membres du groupe "Le Carré", qui a condamné à travers un communiqué "les débordements et l'usage de la violence employée par un groupe d'individus isolés", tout en rappelant leur "attachement au caractère pacifique de ce mouvement populaire qui rassemble toutes les couches de la société". Ce volontariat a encore été une manière de dénoncer le recours à cette violence qui a surtout servi certains individus dont l'objectif n'est autre que de s'attaquer aux biens publics et privés.