Nouvelle crise au Conseil de la nation. Près d'un mois après la démission effective d'Abdelkader Bensalah de la présidence de la Chambre haute du Parlement, intervenue, pour rappel, le 29 décembre 2019, le poste est resté légalement vacant. Salah Goudjil, qui assure l'intérim de la présidence du Conseil de la nation depuis avril dernier, ne veut pas quitter le perchoir. Des sénateurs s'insurgent et en appellent au chef de l'Etat. Le règlement intérieur du Conseil de la nation indique clairement que "deux jours" après la démission du président de la Chambre, le bureau se réunit pour "déclarer la vacance" du poste de président. Une élection d'un nouveau président parmi les membres du Conseil de la nation est organisée dans les 15 jours. Or, Salah Goudjil n'a, jusqu'ici, entrepris aucune action pour organiser la succession de Bensalah. Au lieu de programmer une plénière pour élire un nouveau président du Conseil de la nation, Salah Goudjil, âgé de 90 ans, a convoqué, hier, une réunion de quelques membres du bureau pour préparer les futures échéances, à commencer par le débat sur le plan d'action du gouvernement Abdelaziz Djerad. "Le président du Conseil de la nation par intérim, Salah Goudjil, a présidé, dimanche, une réunion du bureau du Conseil élargie aux présidents des groupes parlementaires, consacrée à l'examen du rôle que doit assumer le Conseil durant la prochaine étape, en conformité avec les engagements du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, et en réponse aux aspirations du peuple et à ses revendications légitimes, à commencer par la première des priorités : l'amendement de la Constitution", indique un communiqué de la Chambre haute du Parlement. Cette réunion a fait sortir des sénateurs de leurs gonds. Un groupe de parlementaires a même tenté de perturber la rencontre. Ils reprochent au président par intérim du Sénat de s'accrocher à son poste. "L'administration (du Conseil de la nation) a prolongé la présidence de Salah Goudjil en violation de la loi", dénonce le sénateur FLN, Abdelwahab Benzaïm, candidat à la candidature pour la présidence du Conseil. Pour ce dernier, Salah Goudjil est "un assoiffé du pouvoir" qui ne veut "rien lâcher". "Au nom de la nouvelle République rêvée par les Algériens, j'en appelle au président de la République, garant de la Constitution", lance Abdelwahab Benzaïm. Amer, ce dernier accuse Aïssa Bouragba, chef de cabinet, de "manœuvrer" pour maintenir Salah Goudjil, "vieux et malade", à la tête de l'institution parlementaire. Contacté par nos soins, Salah Goudjil dit qu'il est "toujours président" du Conseil de la nation. "Rien n'a changé. J'étais, je suis et je reste président" de l'institution parlementaire. À ses détracteurs qui l'accusent d'outrepasser les lois, l'ancien maquisard rétorque que "ce sont des gens qui ambitionnent" de devenir deuxième personnage de l'Etat qui tiennent ce discours. Interrogé sur les raisons qui le poussent à rester en poste malgré la clarté des lois, Salah Goudjil a tout simplement indiqué que "rien n'a changé" depuis qu'il a été désigné, en avril dernier, président du Conseil de la nation par intérim, en remplacement d'Abdelkader Bensalah, appelé à l'époque à devenir chef de l'Etat par intérim. Le choix de Goudjil a été dicté par l'âge. À 89 ans, il était le doyen des sénateurs. Cet épisode de Salah Goudjil rappelle une autre affaire où le président du Conseil de la nation avait été obligé de quitter son poste de force. C'était au début des années 2000. Bachir Boumaza, un ancien moudjahid, occupait le poste du deuxième personnage de l'Etat. Abdelaziz Bouteflika voulait le faire partir. Le concerné refuse. Les tentatives du chef de l'Etat de l'époque de le déloger n'ont abouti qu'après l'usage de la violence. Isolé et résigné, Boumaza a fini par rendre son tablier, cédant le poste de président du Conseil de la nation à un autre ancien cacique du régime, Mohamed-Chérif Messaâdia.