Ce n'est pas encore la grande panne, mais le moteur peine à amorcer la côte et fait preuve d'importantes difficultés au redémarrage. De nombreux pays exportateurs de pétrole s'enfoncent dans la déprime budgétaire, pénalisés par la faiblesse persistante des cours du brut. Depuis la rechute des prix du pétrole au début de l'année, la résilience de nombreuses économies dépendantes des hydrocarbures ne fait que faiblir et l'équilibre budgétaire est désormais rompu. Avec un baril évoluant en moyenne à 42 dollars le baril cette année, nombreux sont les pays qui n'ont pas pu équilibrer leur budget. La résurgence de l'épidémie fait avaler des poires d'angoisse aux pays exportateurs de pétrole dont l'équilibre budgétaire est tributaire d'une bonne rentabilité du baril de pétrole. Or, les prix devraient évoluer autour de 50 dollars l'an prochain, très loin du niveau permettant d'équilibrer le budget des pays exportateurs de pétrole de la région. Dans ses dernières prévisions, le Fonds monétaire international s'attend à ce que la situation budgétaire de l'ensemble des pays exportateurs de pétrole de la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) reste tendue et l'équilibre budgétaire rompu, faute d'une bonne rentabilité du baril de Brent. L'Arabie saoudite, plus grand exportateur de pétrole de l'Opep, a besoin d'un baril de pétrole à 66 dollars pour pouvoir équilibrer son budget au titre du prochain exercice, alors que celui de l'année en cours était tributaire d'un baril à 76 dollars. Preuve de la prudence que nourrit désormais le royaume wahhabite face à l'incertitude qui pointe à l'horizon du marché pétrolier, son ministère des Finances a présenté une pré-note budgétaire bâtie sur un prix prévisionnel de 50 dollars le baril en 2021. La révision à la baisse du prix du marché au titre des arbitrages budgétaires pour le prochain exercice témoigne de la complexité de la situation que connaissent les exportateurs de brut, pris en tenailles entre les impératifs de consommation et de dépense et les notions de prudence budgétaire en ces temps de faibles prix du pétrole. Pour l'Algérie, les projections du Fonds monétaire international montrent que l'équilibre budgétaire tient à un prix du pétrole au-dessus de 157,2 dollars, alors que les comptes extérieurs ne peuvent s'équilibrer qu'avec un prix du Brent au-dessus de 112,2 dollars le baril. Le fait que le Conseil des ministres fasse le choix de ne pas rendre public le cadrage macroéconomique de la loi de finances 2021, dont l'avant-projet a été examiné dimanche, est implicitement lié à la complication de l'équation budgétaire sous l'effet de l'effondrement des cours du brut et de la hausse des besoins de financement, alors que les disponibilités financières s'amenuisaient dangereusement. L'Arabie saoudite et l'Algérie ne sont pas les seules à dépendre de la bonne rentabilité du Brent pour leur équilibre budgétaire. En Iran, l'équilibre du budget est conditionné par un baril à 389 dollars en 2020 et à 320 dollars en 2021, à en croire les projections du FMI, tandis que le budget irakien est tributaire d'un baril à 60 dollars en 2020 et 54 dollars en 2021) pour son équilibre, le Koweït (61 dollars en 2020 et 60 dollars en 2021), les Emirats arabes unis (69 dollars le baril cette année et 61 dollars l'an prochain). Ces projections ne surprennent personne lorsque l'on sait que le budget des pays exportateurs de pétrole est connu pour sa forte connotation dépensière. La paix sociale et les équilibres politiques en dépendent. Quand bien même le prix du brut évoluerait en 2021 au-dessus de la moyenne de l'année en cours, les déficits courant et budgétaire demeureront très élevés et exerceront une forte pression sur les disponibilités financières restantes. Les mesures de restrictions budgétaires pourraient, néanmoins, aggraver les incertitudes et l'impact désastreux de la Covid-19 sur l'économie. Ali T.