La question reste posée quant aux raisons de cette brusque accélération de l'agenda lié à l'acquisition du vaccin et le début de l'opération de vaccination, au moment où le gouvernement est engagé dans une politique plutôt prudentielle sur ce dossier. Au-delà des motivations évidentes liées à la sécurité sanitaire urgente dans le pays, l'instruction du chef de l'Etat demandant au gouvernement d'accélérer la procédure d'acquisition du vaccin anti-Covid, afin de commencer dès le mois prochain la campagne de vaccination, n'a pas manqué de susciter des interrogations, y compris au sein de l'Exécutif lui-même. Et pour cause. Les membres du gouvernement, à commencer par le Premier ministre, tenaient jusque-là un discours plutôt basé sur une politique prudentielle visant à prendre le temps nécessaire avant le choix final du vaccin et du fournisseur. Le Premier ministre ainsi que son ministre de la Santé prônaient encore la prudence quant à l'échéance de la campagne de vaccination ou encore quant au choix du fournisseur de l'antidote. Depuis Médéa en visite de travail, le locataire du Palais sis à l'avenue Dr-Saâdane rappellera l'engagement des pouvoirs publics quant à l'acquisition du vaccin "efficace" et "sûr" pour protéger les Algériens contre le coronavirus. "Nous avons une grande responsabilité concernant l'acquisition du vaccin anti-Covid-19, et lorsque le choix sera porté sur un vaccin et que le produit sera qualifié, nous serons prêts." Cette déclaration de Djerad confirme bel et bien que l'horloge du gouvernement était encore réglée sur la prospection d'un éventuel fournisseur ou sur l'analyse des résultats publiés par les laboratoires internationaux lancés dans la fabrication du vaccin anti-Covid. Le ministre de la Santé était, lui aussi, confiné dans la stratégie prudentielle, en assurant à chaque opportunité que l'Algérie acquerra le vaccin adéquat une fois validé et qualifié par l'OMS, et que l'Algérie est inscrite dans une démarche d'achat groupé dans le cadre du système "Covax" de l'ONU. Autant dire qu'entre le 6 août 2020, soit la date du premier round de négociations scientifiques et même politiques mené par le ministre de la Santé avec des représentants des producteurs de vaccins, et le dimanche 20 décembre, jour du tweet de Tebboune, beaucoup d'eau a coulé sous les ponts. Depuis avant-hier, lundi, le gouvernement adapte son discours et parle désormais "de la consolidation du dispositif national de vaccination avec son déploiement à travers les structures sanitaires de proximité devant couvrir l'ensemble du territoire national". L'on a ainsi dépassé le stade de la prospection de partenaires ou d'analyses des résultats des essais cliniques. La nouvelle horloge décidée par Tebboune est désormais réglée sur le plan vaccinal à mettre en œuvre dans les prochains jours. Le mois de janvier débutera dans moins de 10 jours ; les services compétents sont-ils, eux aussi, prêts à mener l'opération dans les délais impartis ? Une telle question mérite d'être posée, puisque la campagne de vaccination antigrippale n'a pas encore atteint sa vitesse de croisière. Les quantités de sérum contre la grippe, tant promises, ne sont pas totalement livrées aux officines. Cependant, les virologues et les immunologues que nous avons interrogés hier sur la faisabilité de l'opération ont affiché un optimisme mesuré quant à la réussite de la vaccination anti-Covid, sur tous les plans, vu que la décision est prise par la plus haute institution du pays. Mais la question reste posée quant aux raisons de cette brusque accélération de l'agenda lié à l'acquisition du vaccin et le début de l'opération de vaccination. Ce changement de stratégie, imprimé par le chef de l'Etat, semble avoir désarçonné le gouvernement qui s'est promptement mis au garde-à-vous pour donner un prolongement dans la réalité aux instructions présidentielles. Du jour au lendemain, les mêmes autorités compétentes, qui ont tergiversé pendant plus de deux mois, s'engagent, devant le Premier ministre, à être prêtes le jour "j". Tous les moyens indispensables à la mise en branle d'une telle opération sanitaire exceptionnelle seront nécessairement réunis et mobilisés selon l'agenda arrêté par le chef de l'Etat. Sans attendre, Abdelaziz Djerad annoncera, lundi soir, que des instructions ont été données pour "engager toutes les mesures et mobiliser les ressources nécessaires pour assurer la disponibilité du vaccin contre le nouveau coronavirus (Covid-19) et le lancement de l'opération de vaccination dès le mois de janvier 2021, conformément aux directives du président de la République, Abdelmadjid Tebboune", peut-on lire sur le communiqué diffusé par les services du Premier ministre. Pour sa part, "le Comité scientifique chargé du suivi de l'évolution de la pandémie de Covid-19 a, d'ores et déjà, arrêté une short-list des laboratoires développeurs de vaccins et les contrats sont en cours de finalisation pour les premières livraisons", a précisé la même source.