Le Syndicat national des vétérinaires a enclenché son mouvement de grève pour une durée de trois jours. Le débrayage, décidé il y une semaine pour protester contre les conditions de travail qualifiées de lamentables, a été très largement suivi. Annoncée depuis une semaine par le Syndicat national des vétérinaires fonctionnaires de l'Administration publique (SNVFAP), la grève des médecins vétérinaires a été bel et bien enclenchée, hier, pour une durée de trois jours, tout en maintenant un service minimum. Le débrayage a, cependant, causé d'énormes pertes enregistrées, notamment au niveau des ports et aéroports. “Nous avons refusé de tout traiter ou contrôler hormis des poussins vivants”, nous a déclaré un vétérinaire au service d'inspection au niveau de l'aéroport d'Alger Houari-Boumediene qui voit transiter aussi bien des importateurs que des exportateurs. C'est le cas justement de M. Djelloul de la Sarl Medifish, exportateur renommé de crustacés. “Comment peut-on travailler sérieusement face à ce genre de situation ? Je viens de renvoyer mes camions et ma marchandise sera jetée. Je pourrais peut-être sauver 10%”, s'écrit-il. Sans parler du manque à gagner, il vient de perdre trois millions de dinars, soit 600 kg de langoustes qu'il a sorties des viviers pour être exportées hors du pays en un temps record. “Je vais avoir des problèmes avec ma banque, avec mes partenaires (propriétaires de bateaux de pêche), avec mes ouvriers, mais c'est surtout ma crédibilité auprès des clients étrangers qui va en prendre un coup”, déclare notre interlocuteur qui, excédé, ne peut s'empêcher de livrer ses déboires quotidiens, à commencer par la banque en passant par les services des douanes. Il se trouve qu'il n'est pas le seul à se retrouver pénalisé par la grève des vétérinaires. D'autres exportateurs de poissons et fromage n'y ont pas échappé eux aussi. À noter que les services des vétérinaires traitent et inspectent d'autres produits comme des boyaux, des escargots vivants, des œufs à couver, du poisson frais ou congelé, des produits laitiers, des poussins vivants, etc. La situation n'est guère meilleure, nous dit-on, au niveau du port où la valeur des pertes est beaucoup plus élevée vu que le travail des vétérinaires est plus important aussi bien en variété et en volume des produits. Par le biais du port, c'est surtout la viande qui est traitée, et tous les animaux vivants tels que le bétail ainsi que le poisson frais ou congelé, le beurre et le fromage ne peuvent sortir de l'enceinte portuaire sans l'aval des vétérinaires. Les vétérinaires travaillant dans les abattoirs ont, eux aussi, répondu favorablement au mot d'ordre de la grève en refusant d'en- filer leurs blouses blanches qu'ils achètent, par ailleurs eux-mêmes, comme l'ont confié les vétérinaires rencontrés au niveau de l'abattoir d'El-Harrach. Aux allures fantomatiques, les lieux étaient complètement vides des occupants qui habituellement sont très nombreux, nous dit-on. La viande non contrôlée ne pourrait sortir des abattoirs, aussi les maquignons avertis d'avance ont pris leurs dispositions évitant ainsi des situations bien pénibles. “Constatez par vous-mêmes dans quelles conditions nous travaillons. Nous avons nous-mêmes fait le ménage pour que vous puissiez voir ce bureau plutôt propre. Nous n'avons ni micro-ordinateur, ni même de feuille blanche pour rédiger des rapports ou autre chose. Le personnel ne bénéficie ni de prime de transport ni de transport, alors que certains d'entre nous sont obligés d'être sur les lieux du travail à partir de 6 h”, se sont plaints les vétérinaires qui, unanimes, ont exprimé leur ras-le-bol aussi bien par rapport au salaire dérisoire de 14 000 DA qu'ils perçoivent qu'aux conditions de travail. “La situation n'a que trop duré, il est grand temps que cela change”, nous a déclaré le Dr Sayaad, qui n'a pas manqué d'exprimer son satisfecit quant aux résultats de la grève. Celle-ci a été massivement suivie dans la majorité des villes du pays à l'exemple d'Oran, comme confirmé par notre correspondant. Nabila SaIdoun