Sur le plan sportif, Oran verra défiler, tout le long de son histoire, des grands champions et des manifestations de premier ordre, à l'échelle continentale et souvent mondiale. La première grande joute mécanique qu'a connue la ville se situe au début des années 1900. Citroën avait décidé d'organiser, alors, pour la promotion de ses dernières modèles de voitures, un rallye qui relierait Paris à Johannesburg et, donc, qui passerait forcément par Oran. Les Oranais ont dû, à cette époque, voir débarquer des centaines, peut-être des dizaines de centaines de véhicules au port. Le spectacle, pour insolite qu'il était, valait le déplacement et les applaudissements d'un public (européen surtout), qui n'avait jamais vu autant d'engins à la fois. C'est un homme qui va, par ses exploits, passionner toute la ville : Marcel Cerdan, un boxeur poids lourd dont tout le monde parle. Même les pugilistes musulmans, qui ont pourtant d'autres stars à aduler sur les rings tels que Omar le noir ou Chérif Hamia. Et si la mairie coloniale, pour des raisons de prestige, a tenté de confisquer l'aura du champion en faisant croire qu'il était du cru, la vérité nous impose de rétablir les faits, car beaucoup de vieux Oranais pensent encore que Cerdan a vu le jour dans leurs murs. C'est faux… Absolument faux. Marcel Cerdan est un pied-noir né à Casablanca. Il suivra, plus tard, son père, un ingénieur du secteur public, à Sidi Bel-Abbès, puis à Oran, où il habitera derrière le cinéma Régent, une rue étroite qui a porté son nom jusqu'en 1980 environ. Un musulman de M'dina J'dida, Goudih Mohamed, suivra l'exemple de Cerdan. Mais sans sa fin tragique au fond de l'océan. Goudih s'imposera, en quelques années, sur les podiums d'Afrique du Nord grâce à son courage, sa détermination, son assiduité et, surtout, sa volonté de s'en sortir. De sortir de cette misère imposée aux siens par les Français. Après avoir obtenu le titre de champion de France, Goudih est enfin invité, dans le cadre d'un tournoi euro-américain, à boxer à New York. Le rêve pour un garçon de vingt ans qui n'a jamais connu que l'exclusion et le racisme ambiant. À la fin des compétitions, Goudih refusera d'endosser, une fois encore, le maillot bleu. Il refusera même de retourner en France. M. M.