Lorsque l'on a passé près de trente années dans une même institution, des premières fréquentations de la fac, dans une Algérie nouvellement indépendante, jusqu'au départ à la retraite, il est évident que bien des événements, heureux et moins heureux, aient jalonné une carrière. Et lorsque cette institution, la Cinémathèque algérienne, est l'un des rares lieux qui a continué à projeter des films du monde entier, alors les événements ne pouvaient se dérouler sans témoignages, comme un devoir de mémoire. C'est ce qu'a fait Boudjema Karèche, ancien directeur de la Cinémathèque algérienne. Tout au long de sa carrière, l'ancien responsable de la cinémathèque a écrit dans la presse, répondu aux questions des journalistes algériens et étrangers. Et ce sont ces contributions qui viennent d'être rassemblées dans un ouvrage édité par Jazz Editions et qui ont éclairé d'un jour nouveau toutes ces années qui sont passées, peut-être trop vite, tellement riches en bouleversements. Un jour, un film est donc un assemblage de témoignages pris sur le vif, au jour le jour, de la même manière que se déroule le film de la vie. Sur des personnages, sans distinction entre anonymes et célèbres, sur des films, sur des faits qui et surtout sur la ville d'Alger “ma ville”. Structuré en six chapitres au titre générique “Un jour, un …” ; Un jour, un livre commence par un hommage rendu, sur tout un chapitre, à Ali Zammoum, L'homme libre. Ce clin d'œil fait, place est faite aux femmes qui sont toutes, au goût de Boudjema Karèche, “belles et courageuses” qu'elles soient projectionniste, comédienne, étudiante ou bien... agricultrice. Dans la partie intitulée “Un jour un cinéaste”, l'auteur évoque les réalisateurs qui se sont succédé à la cinémathèque ou ceux dont les films y ont été projetés : on y rencontrera pêle-mêle Youssef Chahine, Luis Bunuel, Farouk Belloufa, Alain Tanner, Merzak Allouache, Jean-Luc Godard, Mohamed Zinet… Après avoir parlé du cinéma algérien qu'il ne ménage pas pourtant et qui va de “tout est encore possible” au “zéro production, zéro salle, zéro distributeur, zéro billet vendu.” Boudjema Karèche se livre avec une délectation visible au jeu des questions des journalistes. Entretiens dans lequel il déclare, par exemple, “je ne veux pas mourir” et que “le cinéma est un art authentique et subversif”. Mais ce recueil de textes, parce qu'il passe en revue des faits et des personnages, aurait gagné à signaler la date de leur première parution. Il aurait été davantage aisé de suivre le déroulement du film. SAMIR BENMALEK Un jour, un film, textes choisis de Boudjema Karèche. Jazz Editions, Alger décembre 2005. 260 pages. 400 DA.