Néanmoins, les résultats de l'enquête et de l'autopsie commandées par le parquet ne sont toujours pas connus. “C'est quelqu'un qui aurait pu mourir à l'extérieur.” Par cette précision, Abdeslem Dib, secrétaire général du ministère de la justice, veut démontrer que les conditions de détention n'ont aucun lien avec le décès mercredi dernier de Aloui Mohamed Lazhar (56 ans), ex-directeur général d'El Khalifa Bank, en détention préventive à la maison d'arrêt d'El-Harrach depuis août 2004. Interpellé par les journalistes hier en marge de la signature d'une convention de jumelage entre les écoles pénitentiaires algérienne et française, le collaborateur de Tayeb Belaïz assure que le détenu est mort d'une “crise d'asthme”. “Il était très bien soigné et recevait ses médicaments”, renchérit-il, soucieux d'évacuer les moindres soupçons. Selon Mokhtar Felioune, directeur général de l'administration pénitentiaire, le défunt souffrait d'asthme avant son incarcération. “Il a séjourné un mois à l'hôpital Mustapha-Pacha avant d'y décéder”, note-t-il. M. Aloui avait été admis à l'hôpital le 18 février dernier. Dans un communiqué rendu public, le parquet de Chéraga, dépendant de la cour de Blida et instruisant l'affaire Khalifa, révèle qu'il “avait bénéficié d'une prise en charge régulière soit par les médecins de la maison d'arrêt, soit au niveau du CHU Mustapha-Pacha”, où l'administration pénitentiaire dispose d'un service de soins au profit des détenus dont l'état de santé exige l'évacuation à l'hôpital. Cette assertion, toutefois, est contredite par des sources médicales proches du dossier, qui soutiennent que l'ex-directeur d'El Khalifa Bank a contracté l'asthme au cours de sa détention. Dans leurs rapports, les praticiens de la prison avaient préconisé son transfert vers un autre lieu de détention, notamment à Berrouaghia où le climat est sec et où la prison dispose de compartiments aménagés pour l'accueil des grands malades. Or, ces recommandations du personnel médical sont restées lettre morte. M. Aloui avait été mis sous mandat de dépôt le 17 août 2004 ainsi que deux de ses subalternes, le directeur de la caisse principale et le caissier principal d'El Khalifa Bank pour association de malfaiteurs, vol qualifié, escroquerie, abus de confiance, abus de biens sociaux et infraction à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux. Son décès serait l'une des raisons qui auraient poussé le garde des sceaux à envoyer une note au procureur général de la cour de Blida afin de le presser à tenir le procès Khalifa avant l'été. Me Senhadri, membre de la défense, dit pour sa part tout ignorer d'une telle correspondance. À ce jour, les auditions dans l'affaire Khalifa ont concerné un peu plus de 5 000 personnes interrogées en qualité de témoins ou inculpés. La mise en détention provisoire étant fixée à 8 mois dans les affaires criminelles, elle peut être renouvelée jusqu'à 4 fois. Or, les avocats sont unanimes à dire qu'en cas de maladie grave, les détenus ont le droit d'être laissés en liberté dans l'attente de leur procès. “Le cas de Aloui a été médiatisé, car il est impliqué dans l'affaire Khalifa. Mais il y a beaucoup d'anonymes qui meurent en prison pour insuffisance de soins”, observe Me Benissad. Actuellement, une trentaine de directeurs de banque et d'entreprise sont incarcérés. Comme pour les cadres de l'empire Khalifa, le sort des responsables de la Cnan, mis sous mandat de dépôt suite au naufrage du navire Béchar en 2004, n'est toujours pas fixé. Les avocats de l'ex P-DG Ali Koudil réclament sa mise en liberté provisoire pour des raisons de santé. Il souffre d'un diabète sévère. Samia Lokmane