Maintenant, s'il s'agit à travers les slogans “devoir de vérité”, “devoir de mémoire”, qui sont au demeurant des attentes légitimes, de remuer le couteau dans la plaie et remettre au goût du jour le “Qui tue qui ?”, ce n'est certainement pas la meilleure manière d'en finir avec la crise politique. Un projet politique de l'envergure de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, dont l'ambition est de refermer la parenthèse de quinze ans de violence terroriste, ne peut rallier — fatalement — tous les suffrages. Surtout qu'on est à peine au début de sa mise en œuvre, alors que les plaies de la crise demeurent encore vives et les attentats continuent. Ce qui pourrait expliquer l'émergence sur la scène, ces jours-ci, de ce qui s'apparente à un front de refus où l'on retrouve, paradoxalement, du même côté du manche des familles de victimes du terrorisme et des familles de disparus. Ce front trouve son prolongement à l'extérieur du pays avec cette pétition qui vient d'être initiée par des personnalités politiques, à l'image de Hocine Aït Ahmed. Il ne s'agit pas de contester la démarche dans le fond, en ce sens que ces pétitionnaires ont le droit d'apporter la contradiction — c'est le sens même du débat démocratique —, mais de relever aussi que nombre d'entre eux sont les partisans du fameux contrat de Rome. Pour mémoire, la quintessence de ce contrat, c'était d'aboutir à “une solution politique globale” à travers l'organisation d'un “dialogue sans exclusive”, dont la finalité n'était autre, à l'époque, que la réconciliation nationale, un slogan dont le leader du FFS a la paternité. Aujourd'hui, l'honnêteté intellectuelle oblige à reconnaître que la charte de Bouteflika reprend à son compte la démarche initiée par Sant'Egédio et va bien au-delà. Comme on le voit à travers le sort réservé aux principaux protagonistes de la crise, qui s'en tirent plutôt à bon compte. Maintenant, s'il s'agit à travers les slogans “devoir de vérité”, “devoir de mémoire”, qui sont au demeurant des attentes légitimes, de remuer le couteau dans la plaie et remettre au goût du jour le “Qui tue qui ?”, ce n'est certainement pas la meilleure manière d'en finir avec la crise politique. La paix d'abord à n'importe quel prix maintenant. Quant aux responsabilités des uns et des autres, c'est au tribunal de l'histoire de les établir. N. S.