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Le projet toujours bloqué
Ouverture d'un département de la langue amazighe à Batna
Publié dans Liberté le 02 - 04 - 2006

Le département de la langue berbère tarde à voir le jour dans les Aurès. Les nombreuses tentatives et autres démarches entreprises depuis maintenant une décennie pour faire aboutir ce projet sont restées vaines. L'idée d'un département pour la langue berbère dans les Aurès remonte en effet à 1995, date de la création du Haut Commissariat à l'amazighité. Cette jeune institution l'avait d'ailleurs inscrite, dès son installation, dans son programme d'action. Mais quand bien même les prérogatives exécutoires dont jouissait le HCA force est de constater que l'on n'a pas pu mener à terme ce projet.
Les pesanteurs étaient, dit-on, tellement fortes que l'on a fini par différer l'ouverture de ce département. Selon un ex-membre du HCA, l'absence d'un statut juridique de l'amazighité à l'époque a donné lieu à des réticences, voire à des attitudes négatives à l'encontre de la promotion de cette composante importante de l'identité algérienne.
L'évolution positive, depuis quelques années, de tamazight avec notamment sa consécration comme langue nationale dans la Constitution le 8 avril 2002, a ouvert de nouveaux horizons et redonné de l'espoir quant à l'ouverture de ce département. Le projet fut ainsi relancé en 2004 et une commission fut mise sur pied à l'université Lhadj-Lakhdar de Batna pour accélérer l'ouverture de ce département. Plusieurs réunions ont eu lieu à cet effet pour peaufiner cette “fiche d'habilitation” nécessaire à ce genre de projet.
Tout a été mis en œuvre, selon un membre de cette commission, pour concrétiser cette fois-ci le projet. À telle enseigne que les encadreurs ont été même “sommés” de signer un engagement écrit pour assurer les cours dans ce département après son ouverture. Le dossier ainsi ficelé eut, sans peine, l'aval du conseil scientifique de l'université mais pas celui du ministère, au grand étonnement des membres de la commission.
Le refus de la tutelle est pour le moins incompréhensible, et chacun y va aujourd'hui de son propre avis pour expliquer ce blocage. “Les Aurès, disent certains, est la chasse gardée du pouvoir et rien ne se fera dans cette région, tant qu'il n'y a pas une volonté sincère de réconcilier l'Algérie avec son histoire millénaire.”“Notre région, estiment d'autres, doit être mise à l'écart des recherches qui se font dans le domaine berbère. Elle ne doit servir que d'un faire-valoir au service d'une certaine politique.”Des démarches similaires ont été, récemment, entreprises par le centre universitaire de Khenchela pour faire aboutir ce projet, mais sans aucune suite. Le blocage de ce projet est, dit-on, motivé par des considérations politiques, puisque des départements de “moindre intérêt” ont vu le jour dernièrement dans les deux universités comme ceux de l'interprétariat, de l'anthropologie culturelle, de l'éducation physique…, alors que celui de tamazight est toujours à la traîne. Aujourd'hui, en l'absence d'un département, l'on voit mal comment l'Etat pourrait réhabiliter et promouvoir cette langue. Un espace universitaire dans la région est d'autant plus nécessaire qu'il contribuerait à apporter des réponses aux nombreuses questions relevant de la linguistique, de la sociolinguistique, de la pédagogie et même de l'encadrement.
D'ailleurs, l'enseignement de tamazight dans la région en pâtit terriblement aujourd'hui. Il connaît chaque année un recul sensible faute, justement, d'enseignants.
Salim Guettouchi


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