L'appel des Patriotes de La Mitidja, lancé le 4 avril dernier, au président de la République, a bel et bien été entendu. Pour preuve, le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, M. Noureddine Yazid Zerhouni, qui accompagnait M. Abdelaziz Bouteflika dans sa visite d'inspection dans la capitale, a annoncé, hier, que cette catégorie de résistants “ne seront pas oubliés par l'Etat”. Le ministre a également précisé qu'il reste “juste à définir le cadre légal de cette catégorie (les Patriotes)”. La déclaration de M. Zerhouni intervient quelques jours seulement après la réunion qui a regroupé plus de 200 Patriotes venus des différents hameaux et villages de La Mitidja, au siège du détachement de Boufarik, baptisé au nom du défunt Mohamed Sellami. Rassemblés au lendemain de l'application de la charte dite de la paix et de la réconciliation nationale, ces derniers ont fait le point sur leur situation précaire et réclamé non seulement un statut, mais aussi du travail et de la reconnaissance pour leurs actions inscrites dans le cadre de la lutte contre le terrorisme islamiste. Ils ont interpellé le premier magistrat du pays sur leurs droits, après avoir saisi par courrier Me Farouk Ksentini, parce que convaincus qu'ils sont les “grands oubliés de la République”, sinon les “sacrifiés” de la réconciliation. Forts de leur effectif, quelque 6 000 hommes dont 1 470 opérationnels, les Patriotes de La Mitidja ont alors lancé un appel à l'ensemble de leurs camarades du territoire national (plus de 80 000) pour de se joindre à une marche en direction d'Alger, prévue pour le début du mois de mai. En 1993, c'est sous le gouvernement de Rédha Malek, celui-là même qui avait déclaré que “la peur doit changer de camp”, qu'est née l'idée de création de groupes d'autodéfense, sur demande de certains partis politiques et de syndicalistes. L'objectif était de défendre les zones rurales reculées, lors des incursions des islamistes armés. Deux types de formation ont été créés comme forces d'appoint : les gardes communaux et les groupes d'autodéfense. Les premiers (environ 80 000 personnes), créés en 1993, disposent d'une existence officielle, portent l'uniforme et reçoivent une rémunération de l'Etat. Quant aux Groupes de légitime défense (GLD), connus sous le nom de Patriotes, ils sont regroupés par village, quartier ou famille et sont armés, mais ne bénéficient d'aucun statut. Ils avaient contribué à refaire fonctionner les écoles, l'administration, à organiser l'approvisionnement alimentaire et le travail des champs, à remettre en état les routes et les ponts détruits par le GIA. Beaucoup sont morts, mais ceux qui ont survécu, même parmi les blessés et les estropiés, sont fiers d'affirmer qu'ils ont contribué à la défense de l'Etat algérien et à faire reculer le spectre de la terreur. Hier des héros, les patriotes sont aujourd'hui pour la plupart dans le désarroi, se sentant encombrants, mais aussi rejetés même par les sociétés de gardiennage et la garde communale. Yazid Zerhouni vient donc de remettre les pendules à l'heure. Hafida Ameyar