Mohamed Madat en a gros sur le cœur. En vingt-neuf ans de service, jamais personne ne lui a manqué d'égards. Jusqu'aux incidents de mercredi. Un étudiant, membre de l'UGEL, nourri par la haine du discours idéologique, a brisé la convention. Il a insulté Mohamed Madat. M. Madat est secrétaire général de la section UGTA de Bouraoui. “Ce sont bien des membres de l'UGEL qui ont commis ces actes de violence et de vandalisme et qui nous ont insultés.” Pour lui, ces étudiants ont dépassé les limites de la correction, les limites de la lutte syndicale. “Si nous avons jugé utile de nous impliquer, c'est pour préserver l'établissement”, argumente-t-il. Mais le radicalisme de l'UGEL a poussé la section UGTA à organiser une journée de grève, dimanche dernier. Les étudiants protestataires afficheront à l'attention des leurs pour dénoncer une grève jugée… illégale. Ces derniers croient, en fait, que Mohamed Madat joue le complice du directeur afin de les torpiller. Mustapha Kheloui, président du bureau de l'UNEA (Union nationale des étudiants algériens) d'El-Harrach, confirme la version officielle : “Bien sûr que ce sont des membres de l'UGEL, bien sûr qu'ils ont forcé le portail, arraché l'enseigne de la direction, renversé les citernes.” M. Kheloui se souvient même que le jour où les incidents ont débuté, mercredi donc, il y avait de l'eau du matin au soir. Les étudiants affiliés à l'UGEL ont visiblement mal choisi le contexte. Le représentant de l'UNEA ne se fait guère d'illusion : “En réalité, cette organisation vise à étouffer les libertés individuelles. “L'UGEL est source de violence”, tranche, quant à lui, Smaïl Abid, de l'association Tahar-Djaout. “Elle a instauré un climat de terreur et empêche toute activité culturelle”, ajoute-t-il. Le CAEH (Comité autonome des étudiants d'El-Harrach) approuve la réprobation générale contre l'UGEL. “Pour moi, ces étudiants sont des terroristes de la morale”, commente Boualem Boudjemâa, porte-parole du comité. “Ils veulent faire pression sur la direction, en proposant des menus, par exemple, pour montrer leur prédominance sur le reste des organisations. Ils se présentent comme les représentants exclusifs des étudiants alors qu'ils sont vraiment minoritaires ici”, regrette M. Boudjemâa. Au mois de novembre dernier, le directeur de Bouraoui, M. Bouhara, disait gérer un volcan. Le nombre pléthorique d'organisations estudiantines compliquerait, en effet, la tâche à n'importe quel gestionnaire. Le règlement intérieur des cités universitaires fait référence à un comité de cité, élu par les étudiants, mais ne cite nullement ces organisations qui font la loi aujourd'hui. Le jeu de l'UGEL est, à ce propos, intelligent. Arbitraire, violent, mais intelligent. A Bouraoui, ses membres s'opposent catégoriquement à l'élection d'un comité parce qu'ils sont minoritaires. La justice a certainement bien fait de se mêler de ce qui la regarde cette fois. Le ministère de l'Enseignement supérieur finira peut-être par se sentir concerné lui aussi. L. B.