Après plus de 15 jours de grève des travailleurs de l'Entreprise publique de fabrication de produits parapharmaceutiques et d'hygiène corporelle (Socothyd) des Issers, et à la veille de la réunion du conseil d'administration (prévue pour aujourd'hui), son P-DG, Ahmed Achaïbou, a décidé d'“éclairer l'opinion publique” sur la crise qui secoue sa société. Entouré de ses directeurs financier et du management qualité, ainsi que de son responsable chargé de la communication et d'un consultant spécialisé dans les conflits de travail, M. Achaïbou a déclaré hier, lors d'une conférence de presse animée à l'hôtel Es-Safir à Alger, que son entreprise est “victime d'un problème syndico-syndicaliste”, en accusant “un groupe de 20 travailleurs” d'être derrière la grève qui traîne en fait depuis février dernier et de vouloir son départ. Pourtant, le patron de Socothyd reconnaîtra lui-même que “les salariés sont préoccupés par la privatisation” depuis plusieurs mois. “Socothyd existe depuis 36 ans et emploie actuellement 670 agents ; elle est bénéficiaire depuis sa création. La volonté de l'Etat n'est pas de la brader, bien au contraire… La privatisation est créatrice de richesses, mais nous sommes pour une concurrence loyale”, a-t-il indiqué. Avant de rappeler qu'il a informé le personnel “des garanties données par l'Etat”, à commencer par le maintien des postes de travail. Il y a lieu de noter que la direction de Socothyd, en particulier son P-DG, appuie la démarche de privatisation de l'entreprise, du moins elle ne s'oppose pas à la décision de vente. M. Achaïbou a même confié aux journalistes que la société “pèse lourd sur le marché et gêne quelques opérateurs, dont des importateurs”. Mais, fidèle à sa seule logique de dirigeant, il semble avoir néanmoins du mal à accepter le point de vue différent des travailleurs, faisant fi de l'absence d'un cadre syndical organisé des salariés, des problèmes existant entre “ceux qui se sont érigés en leaders” et les instances locales de l'UGTA (union locale et union de wilaya) et des complicités reconnues au sein des inspections du travail. “Les 20 travailleurs et un autre groupe veulent briser l'élan de Socothyd”, a-t-il souligné en reprochant aux meneurs de la grève dont les 7 membres du comité du personnel, suspendus de leurs fonctions et accusés d'utiliser “l'arme blanche” pour la poursuite de l'action de protestation, d'avoir rendu public un document confidentiel élaboré par le commissaire aux comptes, qui contient des “réserves techniques”. Au cours de la conférence de presse, les dirigeants de Socothyd ont tablé sur le constat fait par l'Inspection du travail, quant à l'“illégalité” de la grève et à l'absence d'un service minimum. “Nous allons solliciter la justice si ces gens-là n'évacuent pas les lieux”, a annoncé M. Achaïbou. Les gestionnaires ont, par ailleurs, apporté des “clarifications” sur les réserves “tout à fait normales” du commissaire aux comptes, et sur les efforts déployés par la direction pour “moderniser la gestion et se conformer aux normes internationales”. De son côté, le consultant de cette entreprise, Djamel Abdelkader, a relevé que le droit de grève “reconnu et protégé par la loi” signifie aussi que “le travailleur est libre d'adhérer à la grève ou de ne pas la suivre”, en déplorant le non-respect par les grévistes du “caractère préventif” contenu dans le dispositif des lois sociales. Tout le monde s'accorde à dire que le conflit actuel n'est pas dans l'intérêt d'une entreprise, dont la qualité des produits est reconnue nationalement et internationalement, et dont la valeur a été estimée à plus de 2 milliards de dinars par un bureau d'études étranger. À qui profite donc le pourrissement de la situation, à la veille de sa passation au privé ? “Je suis disposé à initier des négociations avec les 5 délégués qui ont été élus en assemblée générale pour retrouver la pérennité de l'entreprise”, a informé le P-DG de Socothyd, en lançant “un appel à toute structure pour nous venir en aide et apporter un plus pour régler ce conflit”. H. Ameyar