Les Algériens à l'écoute des évolutions des systèmes judiciaires L'importante délégation judiciaire européenne composée de représentants de 8 barreaux européens (France, Italie, Espagne, Belgique et Roumanie) qui séjourne, depuis deux jours, dans la capitale de l'Ouest, à l'invitation du barreau d'Oran, a poursuivi hier ses travaux par une conférence qui s'est déroulée au musée du Moudjahid devant de nombreux magistrats et avocats algériens. Cette délégation qui a en charge le programme Agis, conçu par la Commission européenne, s'est réunie pour la première fois en dehors des pays européens. Une façon d'entériner l'intégration du barreau d'Oran à ce programme, rejoignant ainsi les barreaux d'Alger et de Blida. Le bâtonnier Bernard Delran, chef de projet Agis, a encore rappelé, hier, la finalité de ce programme : “Harmoniser, rapprocher les pratiques judiciaires des pays européens, aller vers plus de démocratisation et de protection des citoyens, améliorer le fonctionnement de la défense…” Et d'expliquer leur présence à Oran par le “souci qu'a la Commission européenne d'associer les pays de la rive sud de la Méditerranée”. Le projet Agis comprend également la réalisation d'un glossaire, sorte de guide des procédures judiciaires dans les différents pays de la Communauté européenne, “un document qui aura à terme le mérite de retenir les bonnes pratiques”, ajoute encore l'intervenant. Un glossaire que les trois barreaux algériens s'activeront à enrichir par des propositions concrètes avant d'aller eux-mêmes vers la réalisation d'un glossaire en arabe qui sera aussi un outil indispensable pour les émigrés maghrébins résidents. Pour la Commission européenne, ce programme Agis n'est pas un simple cadre de coopération, puisque son contenu prévoit aussi des formations linguistiques et spécialisées, mais c'est un moyen de réagir face à l'évolution du droit anglo-saxon qui s'oppose dans bien des principes et procédures au droit latin. Arriver à harmoniser ou “retenir” du droit anglo-saxon les aspects qui fonctionnent, les aspects positifs, est encore l'objectif latent. Dans tout cela, l'intérêt pour la partie algérienne de participer à de tels travaux est fondamental, selon Me Bourayou, représentant le barreau d'Alger : “Notre système pénal est très proche de celui de la France, il est important de suivre les évolutions et d'être attentifs puisque l'on va vers le système accusatoire qui donne plus de garantie à la défense. La réflexion doit se faire pour évaluer ce système et arriver à plus de transparence et d'équité.” Et d'ajouter plus loin : “La commission nationale de la réforme de la justice se penche sur certains problèmes ; il y a déjà quelques retombées comme le fait que le juge aujourd'hui informe à décharge et plus à charge, les conditions de garde à vue se sont un peu améliorées, mais il ne faut pas oublier de saluer là les efforts des barreaux pour la défense.” Me Selini, bâtonnier d'Alger également présent lors de la conférence, abonde dans le même sens en estimant que l'intérêt est “ d'avoir un éclairage sur l'état de nos droits, tout ce qui concerne les magistrats, la défense, échanger et comparer les différentes approches par exemple en Europe, alors que dans le monde le droit anglo-saxon domine, ils ont un système mixte comme en Espagne, en Italie.” Et de conclure en soulignant que la tendance mondiale où le sécuritaire prend le pas sur les libertés, l'outil AGIS peut permettre de renforcer la démocratisation et les libertés, renforcer la défense et la protection des citoyens. F. Boumediene