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Scènes d'horreur à Alger
Attentat devant la chefferie du gouvernement
Publié dans Liberté le 12 - 04 - 2007

Ciel prémonitoire. Il est gris sur Alger en cette matinée du 11 avril 2007. Il est 10h45.
Alger est secouée par une très forte détonation.
10h50, le boulevard Krim-Belkacem au Télemly est déjà un grand bouchon. Des sirènes se frayent un étroit chemin. Des véhicules de police et des ambulances foncent vers le Palais du gouvernement. L'information est tombée alors que la panique s'est emparée de toutes les rues.
Impossible de s'ouvrir un chemin dès le siège de la Sonelgaz. Toute la chaussée est jonchée de débris de verre. Une épaisse colonne de fumée noire monte vers le ciel. Services de sécurité, riverains et curieux sont déjà là dans un décor indescriptible. Les visages sont déjà marqués par le choc.
Devant ce qui était l'entrée sud du Palais du gouvernement, l'air est irrespirable, odeur de poudre, de brûlé, de matière plastique cramée irritent les yeux qui s'attardent inconsciemment sur l'image des premiers cadavres.
Des corps déchiquetés. On en compte sept. Selon certains témoignages, ce sont des policiers, ceux affectés à la sécurité de l'entrée. Les pompiers sont affairés à éteindre les incendies des voitures qui ont pris feu après l'explosion. Tout le monde est sur les dents, la tension, mais surtout la désolation qui se lit dans tous les regards. Seuls les policiers et les pompiers arrivent à garder un semblant de calme et à maintenir la foule à distance. La façade du bâtiment principal où est située l'entrée du palais est complètement soufflée, du rez-de-chaussée au 7e étage. Une partie de la façade a cédé sous l'intensité de la charge. Les fenêtres et les portes sont également soufflées.
Sur le trottoir, deux carcasses de voitures finissent de se calciner. L'une des carcasses, une petite cylindrée vraisemblablement a servi dans l'attentat. Deux autres voitures sont brûlées, et deux autres ont subi des dégâts. Du sang, des larmes, des bouts de chair humaine ponctuent le va-et-vient incessant des secours, des ambulances et des véhicules des services de sécurité.
Le ministre de l'Intérieur arrive, à ses côtés le patron de la police, Ali Tounsi. Yazid Zerhouni a l'air à la fois énervé et abattu. Il écoute les explications, se renseigne, inspecte l'endroit. Belkhadem arrivé un instant plus tôt est dans le même état. Il arrive à peine à prononcer quelques mots. Il a dénoncé “ce crime”, “cet acte odieux”.
Les pompiers continuent de sortir les blessés de l'immeuble, de les évacuer. Ils ont commencé à déblayer le rez-de-chaussée qui est le plus touché. Sur l'esplanade du Palais du gouvernement, la plupart des voitures ont été également touchées.
Les ministres arrivent par grappe, un par un. Ould Kablia, Zerhouni, Belkhadem, Maghlaoui et Moussa sont déjà là. Suivent Ziari et Haïchour. Louh arrive tout seul. Ce n'est que vers 12h qu'arrive Ould-Abbès.
N'en sortiront que Maghlaoui, Djiar, Haïchour et Ghoulamallah. Des responsables du RND, de l'UGTA sont également venus. Chihab Seddik n'a pas trouvé ses mots pour dénoncer cet acte criminel. Il appellera à la mobilisation. Les cadres et employés du Palais du gouvernement et du ministère de l'Intérieur sortent, blessés ou choqués pour la majorité d'entre eux. Rares ont été ceux qui ont accepté de parler et de témoigner. “J'ai cru que c'était un tremblement de terre, puis le souffle m'a propulsé contre le mur”, dit un jeune cadre travaillant au 2e étage. Cet autre responsable du 4e étage décrit son bureau comme une ville balayée par une tornade. Toutes les fenêtres du bâtiment central ont été soufflées aussi. Même le bureau du Chef du gouvernement est touché. Il n'a plus de porte, confie un rescapé.
“Tous les bureaux sont touchés, mais il n'y a pas de victimes, il n'y a que des blessés”, a indiqué un responsable qui venait de sortir du bloc, les yeux rouges, le costume plein de poussière. D'autres continuent de sortir.
Des parents arrivent pour chercher des proches qui travaillent au palais. On se renseigne, on demande qui après son frère, qui après sa femme, qui après son père ou son mari. Les policiers et les cadres tentent de rassurer. Tout le monde attend. On ne sait quoi.
Un dernier tour sur l'endroit de l'attentat avant de quitter les lieux. Les pompiers ont investi le bâtiment ciblé, la Police scientifique vient de terminer son travail, alors que l'évacuation des véhicules calcinés est déjà entamée. Il n'y a que les policiers et les personnes autorisées sur la route bloquée au niveau du tunnel des facultés et de la Sonelgaz. Même les riverains n'y ont pas accès.
On quitte les lieux avec, dans la mémoire, l'image des victimes et le cratère provoqué par l'explosion.
Et un doute sur le sens pris par le kamikaze. Une version parle d'une petite voiture descendue à vive allure qui a foncé sur le palais et a explosé, l'autre évoque une voiture montant la rue Dr Saâdane et prenant le sens interdit vers l'entrée du palais ; les policiers ont tiré sur le chauffeur qui a réussi à la faire exploser.
Djilali B.


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