Un camp d'entraînement du GSPC pour enfants aurait été découvert aux alentours de Thénia. C'est-à-dire aux environs d'Alger, puisque le faubourg en question se trouve à moins de cinquante kilomètres de la capitale. Treize de ces enfants qui ont entre 14 et 18 ans ont été arrêtés. Trois d'entre eux ont été placés sous mandat de dépôt, dix autres ont été relâchés, rapporte l'article qui relate le fait, sans préciser les conditions de cette liberté. On ne sait si leur liberté est assortie de quelque attentif encadrement. Mais, me direz-vous, en matière de répression, le terrorisme est devenu, par la loi, et depuis bien longtemps une circonstance atténuante. Ces adolescents de Thénia et des alentours manient déjà le PA et la kalachnikov et partageaient leur temps entre le collège ou le lycée et un camp d'entraînement de desperados. J'apprends l'histoire de ces apprentis tueurs entre l'examen du BEM et celui du baccalauréat ! Lisant des banalités du genre “les sujets étaient abordables” ou “le taux de réussite à l'examen de sixième a doublé”. Quelles dérisoires annonces devant le tragique d'une réalité où les gosses peuvent allègrement passer du collège au maquis ! Il faut tout de même un sacré ratage éducatif pour que cela soit socialement possible. Cette chronique s'est toujours efforcée de ne pas céder au péché de l'ego, mais je ne peux m'empêcher de comparer l'usage qui est fait des enfants d'aujourd'hui avec le traitement dont ma génération d'enfants a joui, en particulier dans le collège de mon adolescence à… Thénia, de la part de responsables politiques et pédagogiques, à l'époque bien moins dotés en moyens que les dirigeants et éducateurs d'aujourd'hui. Pas de lycée à Thénia jusqu'au milieu ou à la fin des années 1970. À peine deux collèges pour six communes ! Mais les proviseurs des établissements avoisinants, les lycées de Dellys (Technique), d'El-Harrach (Abane-Ramdane) et de Bab El-Oued (Emir-Abdelkader) s'en souviennent sûrement : passer d'un collège à un lycée n'était pas une formalité, mais venir d'un CEG, comme celui de Thénia, constituait une assurance pour l'établissement qui accueille. Monsieur Rezé, ex-directeur du CEG, est parti vendre des livres dans sa Bretagne natale. De savoir que d'actuels élèves de son ancien collège font du terrorisme en guise de travaux pratiques doit le faire retourner dans sa librairie, ou sa tombe. Monsieur Hasbellaoui, promu cadre de l'enseignement, doit se mordre les doigts de savoir que ce qu'il a pu faire pour nous, il n'a pas pu le faire pour nos enfants. Madame Cheheb ou Mademoiselle Vennat ont-elles pu continuer à orienter les adolescents comme elles le faisaient à Thénia, avec l'efficacité de jeunes femmes engagées qui montraient le chemin à des élèves qu'elles dépassaient d'à peine quelques années ? Les forces qui ont programmé la déchéance pour que la médiocrité parvienne puis se maintienne au pouvoir ont eu raison de la volonté de ces résistants de l'éducation. Ils ont l'hommage quotidien et silencieux de leurs élèves. Mais, vous, qui vous célébrera ? Des futurs adultes aujourd'hui livrés aux ferments de l'ingratitude : un savoir approximatif, un discours irrationnel et haineux ? M. H. [email protected]