C'est la première fois en Algérie que de jeunes collégiens sont jugés et condamnés devant un tribunal criminel, celui de Boumerdès, pour affaire de terrorisme. On sait que pour des affaires de terrorisme, le code pénal considère les jeunes âgés entre 16 et 17 ans comme majeurs et sont traités en tant que tels. Le tribunal criminel près la cour de Boumerdès a condamné, jeudi dernier, quatre mineurs, trois collégiens et un lycéen âgés entre 16 et 17 ans, à 3 ans de prison ferme chacun pour “adhésion à groupe terroriste armé”, alors que deux autres ont écopé de deux années de prison ferme pour “non-dénonciation de malfaiteurs”. On sait déjà que cinq de leurs camarades, tous collégiens, âgés de 14 et 15 ans, qui font partie du même groupe et qui étaient mêlés à la même affaire, ont été condamnés en janvier dernier par le juge pour mineurs à 3 ans avec sursis pour les mêmes chefs d'accusation. Mais s'agissant d'un tribunal criminel, c'est pour la première fois en Algérie que des jeunes collégiens sont jugés et condamnés devant cette institution pour affaire de terrorisme. On sait que pour des affaires de terrorisme, le code pénal considère les jeunes âgés entre 16 et 17 ans comme majeurs et sont traités en tant que tels. Présents hier au box des accusés, les six jeunes mineurs écoutaient attentivement la lecture de l'arrêt de renvoi. Selon ce document, les services de la police judiciaire de la wilaya de Boumerdès ont arrêté le 30 mai 2007, au lieudit Ahl El-Oued, dans la commune de Tidjellabine, deux collégiens suite à des informations crédibles faisant état de contacts réguliers entre ces deux personnes et un groupe terroriste en ce même lieu. Après vérification, les services de sécurité ont saisi sur les deux mineurs plusieurs CD subversifs faisant l'apologie des actes terroristes en Tchétchénie et en Irak, une somme de 5 600 DA, un portable de marque Sagem et plusieurs puces Nedjma. Après interrogatoire, les deux collégiens ont divulgué, selon l'arrêt de renvoi, l'identité des membres du groupe terroriste avec lesquels ils se réunissaient dans la forêt ainsi que ceux d'autres jeunes de leur âge, travaillant pour le même groupe terroriste. Il ont affirmé aux enquêteurs que l'argent et les autres accessoires trouvés en leur possession leur étaient fournis par les terroristes en contrepartie d'un travail de renseignement axé notamment sur les mouvements des services de sécurité et certains responsables locaux. Lors des différents interrogatoires, les six mineurs auraient reconnu leur appartenance et des accointances avec le groupe terroriste de Thénia, ainsi que les actes terroristes qu'ils auraient commis au nom du groupe, comme ils ont maintenu leurs déclarations lors des différentes étapes de l'instruction. Ainsi ils auraient avoué plusieurs activités menées au profit du groupe terroriste comme ils auraient assisté à des séances de visionnage de films sur les attentats en Algérie, en Irak et ailleurs. Ils sont également accusés d'avoir pris part à l'opération du kidnapping du commerçant T. B., en avertissant les terroristes de sa présence dans son magasin. Ce dernier, présent hier à l'audience, passera neuf jours entre les mains de ses ravisseurs avant d'être libéré contre une rançon de 300 millions de centimes versée par son frère, bien que les terroristes aient préalablement exigé la somme de 10 milliards. Après la lecture de l'arrêt de renvoi, le juge s'adresse au plus âgé, un lycéen que les terroristes avaient surnommé Abou Doudjala, lui demandant ses relations avec la seriat de Thénia. “Je ne les connais pas et je n'ai jamais été au maquis”, répond l'accusé. Le juge revient à la charge : “Mais vous avez reconnu les faits devant le juge et les policiers en présence de vos parents.” “Non, Monsieur le juge”, répond sèchement le lycéen. Le juge interpelle un autre accusé, puis un autre. Mais il reçoit la même réponse. Un des avocats des mineurs intervient et demande au juge de demander aux adolescents pourquoi n'ont-ils pas alerté la police. “Nous avions peur pour nous et pour nos parents”, répond soudain H'mida, un des accusés. Lors de leurs plaidoiries, les avocats ont indiqué que ces jeunes ne véhiculent pas d'idées djihadistes et qu'ils n'ont aucune relation avec les terroristes. Maître Abaziz a notamment insisté sur les conditions sociales de ces jeunes et qu'ils ont la malchance d'habiter tout près de la forêt, dit-il. Sa collègue, maître Abassi, a enchaîné en mettant en garde le parquet qui avait requis 10 ans de prison ferme à l'encontre des six jeunes mineurs. “C'est en les condamnant que vous allez en faire des terroristes. Prenez garde, c'est une bombe à retardement”, a-t-elle averti, avant d'ajouter que la place de ces jeunes, depuis une année en prison, est à l'école et non pas dans une cellule. Suite aux propos pleins d'émotion de l'avocate, une mère assise dans la salle éclate en sanglots. C'est à ce moment-là que le juge intervient une autre fois pour demander aux jeunes collégiens si ils ont un dernier mot à dire. “L'acquittement pour pouvoir poursuivre nos études”, répond le lycéen. Après délibération, le tribunal condamne les six mineurs à deux et à trois ans de prison ferme alors que Gouri Abdelmalek dit Khaled, “émir” de la seriat de Thénia, et treize de ses acolytes responsables de l'enrôlement de ces mineurs, ont été condamnés dans cette affaire à la peine capitale. Pour rappel, le tribunal pour mineurs de Boumerdès avait déjà condamné en octobre 2007 un jeune de 14 ans à quatre années de prison avec sursis pour “adhésion à groupe armé”. L'adolescent lui aussi est originaire de Thénia ; il a suivi des cours d'entraînement de maniement d'armes dans les maquis de l'ex-GSPC d'Ouled Salah de Thénia. Le juge avait exigé que ce mineur soit placé sous contrôle d'un spécialiste d'enfants pendant une durée d'une année et qu'un rapport de suivi soit transmis tous les trois mois au juge des mineurs du tribunal de Boumerdès. M. T.