L'injustice est à son apogée avec cette injonction de la Fédération internationale de football (Fifa) aux joueurs maliens, Frédéric Kanouté et Mahamadou Diarra, de jouer pour le compte de leurs clubs respectifs, FC Séville et Real Madrid, aujourd'hui à l'occasion de la dernière journée de la Liga espagnole, aux dépens de leur sélection nationale appelée à disputer un match décisif dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2008 face à la Sierra Leone. Mais ce qui est à relever dans cette affaire, c'est que le Brésilien Robinho, lui, n'a été laissé à la disposition du club madrilène qu'avec le O. K. de la puissante Confédération brésilienne de football. L'instance suprême du football mondial vient de fouler aux pieds toutes les règles régissant le sport, y compris les siennes, qui donnaient le droit aux footballeurs de rejoindre leurs équipes nationales, à l'occasion des compétitions internationales où elles sont engagées. Cette décision de la Fifa constitue un manque de respect non seulement envers le Mali, mais envers l'ensemble du continent africain. “C'est incroyable ce qu'a fait la Fifa. Quatre jours avant le match, je dois changer l'équipe. La Fifa ne respecte pas le Mali. C'est un manque de respect de dire à un sélectionneur qu'il ne peut pas compter ni sur Kanouté ni sur Diarra quatre jours avant un match aussi important”, telle est la réaction de l'entraîneur français du Mali, Jean-François Jodar. Heureusement pour le Mali, les clubs algériens, le MC Alger et la JS Kabylie, ont joué le jeu en acceptant de libérer Moussa Coulibaly et Cheikh Omar Dabo à cette occasion. Ceci dit, les pratiques de la Fifa ont été dénoncées par le président Abdelaziz Bouteflika à l'occasion de son allocution lors du lancement de l'Année internationale du football africain 2007, au premier jour du 8e sommet de l'Union africaine le 29 janvier dernier à Addis-Abeba. Déplorant que les règles et pratiques internationales en vigueur “sont nettement défavorables à l'Afrique et entravent le développement du sport en général et du football en particulier”, le chef de l'Etat avait alors indiqué que la cérémonie organisée par l'Union africaine était “l'occasion de rendre un hommage, appuyé et mérité, à l'ensemble des footballeurs africains”. Il ajoutera que cette cérémonie “permet d'examiner l'état de ce sport à la fois populaire et sacralisé, mais elle nous enjoint aussi de remédier aux inégalités frappantes liées au système international qui régit actuellement le sport d'élite”. En faisant allusion aux nombreuses injustices dont a été victime l'Afrique, Abdelaziz Bouteflika rappellera que “certains protagonistes ont reconnu récemment la triche organisée entre Européens aux dépens de l'équipe nationale de l'Algérie, sans que la Fifa ne s'en émeuve particulièrement. Plus de vingt ans après, la nouvelle fait encore, et à juste titre, sensation”. Ceci étant, par son injonction aux deux joueurs maliens de rejoindre leurs clubs, la Fifa a provoqué également l'ire des deux concernés. Ainsi, Mahamadou Diarra protestera énergiquement : “Ce qu'a fait la Fifa est scandaleux, je suis outré, c'est un manque de respect envers le football africain et l'Afrique en général.” Il cherchera à éviter la colère de ses compatriotes en ajoutant : “Kanouté et moi sommes dans la merde car, au pays, les gens pensent que c'est nous qui ne voulons pas défendre les couleurs du Mali.” Face à ces injustices de la Fifa, l'Union africaine devrait demander à la Confédération africaine de football (CAF) d'assumer pleinement son rôle de défenseur du sport roi en Afrique, et de veiller particulièrement au respect des droits de ses joueurs expatriés, afin qu'ils soient traités sur un pied d'égalité avec leurs coéquipiers d'autres nationalités. K. ABDELKAMEL