La porte-parole de l'Exécutif a affirmé hier qu'aucune piste de recherche n'est négligée. Interpellé sur l'affaire des 31 touristes européens disparus dans le désert algérien depuis près de deux mois, l'Etat, qui avait observé jusque-là un silence fort embarrassant, s'exprime enfin. Dans un point de presse tenu hier à l'issue de la réunion du Conseil de gouvernement, Khalida Toumi, ministre de la Culture et de la Communication et porte-parole du gouvernement, a affirmé qu' “aucune éventualité n'est écartée” dans cette affaire. Elle a, par ailleurs, révélé que “l'Etat a déployé d'énormes moyens pour fouiller 400 000 km2 de désert”. La représentante de l'Exécutif a enfin promis de rendre publics les résultats des recherches dès qu'elles aboutiront. Si on s'en tient à cette déclaration, l'énigme reste encore entière sur la disparition des touristes. Officiellement, aucune piste de recherche n'est privilégiée. Evoquée par les médias, la thèse d'un enlèvement terroriste ne bénéficie officiellement d'aucun crédit auprès des autorités. “Les enquêteurs étudient toutes les pistes”, s'est contentée de dire Khalida Toumi. Prolixe, le chef de la diplomatie algérienne avait, la semaine dernière, révélé à son homologue autrichienne venue à Alger s'enquérir du sort de ses compatriotes, que l'ensemble des touristes était encore en vie le 8 avril dernier. Sur quelles preuves s'est appuyé Abdelaziz Belkhadem pour se montrer aussi rassurant. Une telle assertion suggère que les disparus ont donné signe de vie, au mieux, qu'ils ont été localisés. Envoyé spécial à Illizi, Frantz Norman, journaliste de la Télévision autrichienne a affirmé, vendredi dernier, que 11 des 31 touristes ont été effectivement localisés et qu'ils seraient retenus en otage par un groupe terroriste. Des sources proches des militaires se sont également fait l'écho de cette éventualité en soupçonnant la présence des ravisseurs et de leurs victimes dans une région située au nord de la ville d'Illizi, appelée la route des Tombeaux. Des vivres et un véhicule tout-terrain de type Station y ont été découverts. Une communication satellitaire entre les ravisseurs aurait été également interceptée. Mais qui seraient les preneurs d'otages ? A l'annonce des multiples disparitions, le nom de Benmokhtar, alias Belaouer est évoqué. Chef terroriste affilié au Groupe salafiste de la prédiction et du combat (GSPC), Benmokhtar est connu pour avoir semé la terreur pendant plusieurs années dans le Grand-Sud. Il avait même menacé le rally-raid Paris-Dakar. Serait-il passé à l'acte en kidnappant plus d'une trentaine de touristes ? Selon certaines sources, le sieur Benmokhtar serait hors de cause. Réfugié au Burkina Faso depuis trois ans, il aurait rangé ses armes. A sa place aurait prospéré un autre groupe directement lié à Al-Qaïda. Ses éléments auraient transité par les frontières est ou sud et auraient élu domicile dans le triangle Tamanrasset-Illizi-Djanet. Cette nouvelle organisation serait-elle aussi puissante pour tendre ses tentacules sur une superficie de plus de 200 000 km2 ? L'enlèvement d'une trentaine de touristes suppose, en effet, une grande logistique. Un tel acte est par ailleurs normalement motivé par une demande de rançon ou des revendications. Les ravisseurs se sont-ils manifestés ? On n'en sait rien. Des sources parlent de négociations en cours entre les ravisseurs et les autorités. Vrai ou faux. En l'absence d'une communication officielle exhaustive sur cette affaire de disparitions, toutes les hypothèses sont avancées comme des pistes de recherche. Extra-muros, dans les pays d'origine des touristes, le mutisme des autorités algériennes crédite davantage la thèse du rapt terroriste. Bien évidemment, une telle éventualité a tôt fait de rabrouer le désir de nouveaux touristes de se rendre dans le Sud algérien. A Illizi, à Djanet et à Tamanrasset, les agents de voyage ont vu pour la plupart des réservations annulées. Pourtant, aucun des touristes disparus n'était venu dans le cadre d'un séjour organisé. Tous se sont engouffrés dans le vaste désert sans guide. Est-ce toutefois suffisant pour disparaître ? Jamais auparavant, l'aventure en solo sur le plateau du Hoggar et du Tassili n'avait été fatale pour un nombre aussi important de touristes S. L.