Le conseil de l'Ordre des pharmaciens d'Alger a proposé, hier, l'application d'une nouvelle loi sanitaire susceptible de mettre en place les bonnes pratiques et mettre un terme aux nombreuses insuffisances qui entravent le bon exercice de la profession. Dans une conférence de presse animée au Forum d'El Moudjahid, le docteur Lotfi Benbahmed, président du conseil, a d'emblée relevé que la loi sanitaire de 1985 est “dépassée”, demandant l'actualisation de la réglementation conforme avec le nouvel environnement socioéconomique du pays. Il a, en outre, stigmatisé certains confrères “complaisants” qui portent atteinte à la crédibilité de la profession, en louant leur diplôme à de tierces personnes, appelant les pouvoirs publics à “criminaliser” ce phénomène afin d'éviter “toute dérive qui menacerait la santé publique”. “Le pharmacien doit être présent dans son officine et ne peut pour une quelconque raison laisser la gérance de la pharmacie à une tierce personne, sauf à un pharmacien reconnu”, a-t-il martelé citant, à titre d'exemple, le cas d'une pharmacienne qui a loué son diplôme à deux associés, l'un cordonnier et l'autre cafetier. “Une pharmacie sans pharmacien doit être fermée, sinon cela relèverait de l'exercice illégal de la profession”, a-t-il encore souligné, en insistant sur la lutte contre ce type de “charlatanisme” qui prolifère dans le pays. Dans le but de lutter contre ce phénomène, il a recommandé la formation de pharmaciens inspecteurs, comme dans le passé. Selon le Dr Benbahmed, il existe moins de pharmaciens inspecteurs qu'il y a 30 ans. Dans le même sillage, il a appelé l'Etat à soutenir la jeune industrie pharmaceutique nationale par des mesures incitatives et à imposer des mesures coercitives aux importateurs de médicaments. Des “lobbies”, fait-il remarquer, s'opposent au développement de cette industrie dans notre pays donnant pour preuve la suppression sans explication de la spécialité “pharmacie industrielle” du cursus universitaire de pharmacie. “L'industrie pharmaceutique est hautement stratégique car elle sécurise la santé publique et génère une forte valeur ajoutée, car grande créatrice d'emplois”, a-t-il expliqué. Il a, dans cet esprit, encouragé la création de l'agence du médicament afin de réguler le marché et mettre fin à la spéculation. Mettant l'accent sur la mise à niveau de la formation des pharmaciens, le Dr Benbahmed a prôné l'autonomisation des facultés de pharmacie. Il existe actuellement 12 départements de pharmacie qui pèchent par “le manque d'encadrement pédagogique nécessaire”, selon le Dr Benbahmed. “La santé publique de demain sera gérée par ces étudiants qui méritent une meilleure formation. Il faut privilégier la qualité à la quantité”, a-t-il recommandé, tout en insistant également sur la formation médicale continue. L'autre grief dont souffre la profession est relatif à la distribution, qualifiée de “maillon faible” de la chaîne du médicament en Algérie. La transition “brutale” du secteur vers le libéralisme sans imposition de garde-fous a “permis à plusieurs personnes de s'engouffrer dans la brèche et créer ainsi un trabendo du médicament”, a-t-il fait savoir. “Le médicament est un produit dangereux et sa distribution doit relever de la seule compétence du pharmacien pour éviter précisément les médicaments contrefaits ou tout autre dérive”, a-t-il encore expliqué. Il existe 400 grossistes dans le pays alors qu'ils ne sont que 30 au Maroc et 3 en France. Dans ces pays, selon lui, “le problème de traçabilité de la chaîne de responsabilité ne se pose pas avec acuité comme chez nous”. On comptabilise 7 000 pharmaciens dont 6 200 privés et 800 publics. Synthèse R. N.