Au moment où Al-Qaïda recrute ses apprentis kamikazes, les mosquées sont entraînées dans des aventures risquées de mariages collectifs et de création d'entreprises…voire de bijouteries. Il y a une semaine, soit vendredi 18 janvier dernier, K. K. un repris de justice, âgé de 34 ans, a mis fin aux jours de Z. M., âgé de 38 ans, imam de la mosquée Okba Ibnou-Nafaâ de Oum El-Bouaghi. C'est juste après l'accomplissement de la prière d'El-Asr, en ce jour de Achoura, que la victime, encore assise après l'accomplissement de la prière, reçut dans son dos un seul et fatal coup de couteau. Le défunt, originaire d'El-Oued, laissa 3 orphelins. Le premier âgé à peine de 6 ans alors que le dernier est encore un embryon porté par sa veuve. L'imam s'est investi corps et âme, pour ne pas dire “vie”, dans le redéploiement que connaît la mosquée algérienne ces dernières années. Une tendance qui donne la primauté aux actions socioéconomiques au détriment du fait religieux. L'assassin a connu sa victime dans le cadre d'un projet de mariage dont certains sont parrainés, financièrement et moralement, à fort support médiatique, depuis un certain temps, par les démembrements extérieurs du ministère des Affaires religieuses. Selon nos sources locales, l'imam, de très bonne réputation d'ailleurs, a été approché pour statuer sur une affaire de dot après que K. K., demanda une rupture avant même la consommation de son mariage. Il harcela l'imam pour l'obliger à lui restituer la totalité du montant de la dot, déjà versée à la mariée, du moment que la raison d'être du mariage n'existait plus. Chose que refusa l'imam pour qui, dans ce genre de situations, seule la moitié du montant engagé est à restituer. Une façon de réhabiliter la femme dont les intérêts sont déjà protégés par la législation en vigueur. Le 13 octobre 2006, K. K. passe des menaces à l'acte, qu'il a bien préparé et prémédité, lors de la prière du Sobh. Il poignarda, dans le dos, l'imam. Ce dernier, après un long séjour à l'hôpital, sera sauvé de la mort. Jugé K. K. est condamné à 6 mois de prison ferme. Cette clémence, qui laisse perplexe plus d'un, est justifié par le pardon accordé par la victime à son bourreau. Pourtant, on a bien assisté à des jugements à la prison ferme pour de simples délits y compris d'opinion, où les victimes avaient bien pardonnées. Le peuple au nom duquel les jugements sont prononcés, peut-il pardonner une tentative d'assassinat avec préméditation ? Comme dans toutes les religions, on voit même un imam, un prêtre ou un rabin ne pas pardonner. Dans un état de droit, l'analyse du profil de l'auteur du crime est déterminante pour les juges. Après cet acte ignoble, l'imam, une fois guéri, bénéficia d'une protection. Il est exonéré des prières du sobh et d'el-icha. Une fois, sorti de son court séjour en prison, K. K. relança sa demande de la totalité de la dot. L'imam est carrément sommé par le lâche K. K. de récupérer l'argent ou de quitter Oum El-Bouaghi, lui qui est originaire de la région d'El-Oued. En fait, K. K. n'avait pas le courage de s'attaquer à la famille de la fille. Les soi- disant notables de Oum El-Bouaghi, eux, traîneront, à jamais, la responsabilité morale de n'avoir pas user de leur bravoure de chaouie pour mettre un terme à ces menaces contre un étranger vivant chez eux. Le 18 janvier dernier, après avoir accompli la prière d'el-asr, le jeune imam, à jeun en ce jour de Achoura, est froidement assassiné par la personne à laquelle, près d'une année avant, il accorda son pardon. Une personne qui avait besoin, lors de sa présence dans la mosquée, de prêche sur le courage, la bravoure ainsi que sur la bonne éducation et non d'un coup de pouce pour se marier ou restituer l'argent de sa dot. Plusieurs enseignements sont à tirer de ce crime. Après les circoncisions collectives, qui ont abouti au drame du Khroub, à Constantine, les mariages collectifs mèneront un jour ou l'autre à des drames plus cruels. Entre-temps, l'exploitation directe par les mosquées de la zakat est en train de déraper. La semaine dernière, les téléspectateurs de la chaîne TV algérienne n'en revenaient pas quand ils ont vu les cadres du secteur présenter, comme signe de réussite des fameux microcrédits, le financement d'une bijouterie pour un jeune. L'opinion publique se demande, encore, où trouvent les imams et les cadres du secteur autant de temps pour faire dans l'économique, le social, le religieux et la lutte par la parole contre les prêches des exégètes d'Al-Qaïda. Le tout entre deux voyages par an dans les Lieux saints en qualité de guide. Mourad KEZZAR