En huit années de présence à la Maison-Blanche, George W. Bush a rarement fait preuve de considération en direction des pays du Maghreb en dépit de leur importance stratégique pour la politique américaine dans la région. Ni lui, ni son numéro deux, ni sa principale collaboratrice, Condoleezza Rice, n'y ont effectué de visite, alors qu'ils ont fait de nombreux déplacements dans des pays limitrophes. À l'exception de Donald Rumsfeld, l'ancien secrétaire d'Etat américain à la défense, dont les missions sont purement techniques sur le plan militaire, qui a fait une tournée éclair au Maghreb, l'administration Bush n'a manifesté aucun intérêt réel ni considération pour les pays concernés. Il faut dire que les occasions, au cours desquelles le locataire du bureau Ovale a fait référence aux Etats maghrébins, se comptent sur les doigts d'une seule main. Quant à l'idée d'y faire une tournée, elle ne lui a sûrement pas effleuré l'esprit. Et pourtant, des liens importants existent entre les Etats-Unis et ces pays. Certes, ils diffèrent d'un pays à l'autre, mais ils devraient justifier un peu plus de considération en leur direction. Avec l'Algérie, les rapports, qui étaient beaucoup plus économiques auparavant, se sont mus en une collaboration plus étroite dans différents domaines, notamment en matière sécuritaire en raison de la menace terroriste après la transformation du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) en Al-Qaïda pour le Maghreb, avec ses ramifications au Maroc, en Mauritanie et en Tunisie. Quant au Maroc, il est considéré comme un véritable allié de Washington d'autant plus qu'il abrite des bases militaires américaines, sans oublier les relations commerciales d'envergure entre les deux parties. Même la Tunisie entretient des rapports non négligeables avec l'Oncle Sam, surtout depuis que Zine el-Abidine Benali est arrivé au pouvoir. Pour rappel, le président tunisien est un militaire de carrière qui a été formé à la célèbre académie militaire américaine de West Point. La Libye n'est pas en reste. Tripoli, qui a consenti de grands efforts sur la question des droits de l'homme, a également renoncé aux armes de destruction massive pour réintégrer le concert des Nations. La Mauritanie est allée quant à elle jusqu'à nouer des relations diplomatiques avec Israël pour s'attirer les bonnes grâces américaines. Il ne faut pas oublier non plus l'importante opération de mise en place d'un commandement militaire américain en Afrique (Africom). Il n'en demeure pas moins que l'administration Bush continue à ignorer superbement ces cinq pays. Les plus hauts responsables américains, particulièrement le président, son numéro deux, Dick Cheney, et le numéro trois, Condoleezza Rice, dont les allers-retours au Moyen-Orient et en Irak sont légion, n'ont jamais daigné faire, ne serait-ce qu'une escale à Rabat, Tunis, Alger, Tripoli ou Nouakchott. Ce sont des sous-fifres, généralement des adjoints du département d'Etat américain, comme David Welch, Nicholas Burns ou John Negroponte, qui ont été chargés de missions bien précises dans la région. De toute façon, à l'exception de l'Irak, dont nul n'ignore l'importance dans la politique de George Bush, l'Arabie Saoudite, qui demeure la pompe à essence de Washington, et l'Egypte, considérée comme le pivot dans les relations américano-arabes, les autres pays de la région comptent apparemment pour du beurre aux yeux du patron de la Maison-Blanche. Reste à savoir si cela est prémédité, ou, plongés dans la gestion des guerres qu'ils ont déclenchées en Afghanistan et en Irak et les dossiers urgents, le président américain et ses proches collaborateurs ont négligé le Maghreb. K. ABDELKAMEL