Que plaidera-t-il, coupable ou non ? Le conte à rebours a commencé pour Radovan Karadzic pour donner sa réponse devant le Tribunal pénal international (TPI) de La Haye de son inculpation pour génocide, crime de guerre et crime contre l'humanité. L'ancien chef politique des Serbes de Bosnie Radovan Karadzic, arrêté à Belgrade en juillet treize ans après son inculpation pour génocide, dira vendredi s'il plaide coupable ou non devant le Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie à La Haye. Lors de cette deuxième apparition publique depuis son arrestation, le juge Iain Bonomy doit demander à l'accusé s'il plaide coupable ou non des onze chefs de crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide pesant sur lui pour son rôle dans la guerre de Bosnie (1992-1995). Lors de sa comparution initiale le 31 juillet, l'inculpé avait choisi d'utiliser le délai légal de réflexion de trente jours auquel il avait droit. Au cas très improbable où il plaiderait coupable, Radovan Karadzic échapperait à un procès et les juges n'auraient qu'à décider de sa peine. S'il refusait de répondre, le juge prononcerait en son nom un “non coupable” automatique. Le suspense de cette deuxième apparition publique réside surtout dans ce que dira l'accusé à l'audience, et dans ce qu'il pourrait révéler de nouveau sur ses années de cavale ou bien sur sa stratégie de défense. Radovan Karadzic, 63 ans, était jusqu'à son arrestation le 21 juillet l'un des deux fugitifs les plus recherchés d'Europe, avec son alter ego militaire, le général Ratko Mladic, toujours en fuite. Il est considéré comme le cerveau du "nettoyage ethnique" lancé, avec l'appui de Belgrade selon le procureur du TPI, contre les Musulmans et Croates durant la guerre de Bosnie ayant fait 100.000 morts et 2,2 millions de déplacés. Outre le massacre de 8 000 hommes et garçons musulmans à Srebrenica, dans l'est de la Bosnie, en 1995, il devra également répondre du long siège meurtrier de Sarajevo et de la détention de milliers de civils dans des camps, notamment dans la région de Prijedor (nord-ouest de la Bosnie). Lors de sa première comparution, Radovan Karadzic avait confirmé qu'il souhaitait assurer lui-même sa défense. Les juges doivent encore statuer sur cette demande. Comme lors de cette audience, l'accusé a depuis dénoncé dans plusieurs courriers au tribunal des “irrégularités” lors de son arrestation et évoqué un “accord secret” avec les Américains qui lui aurait permis d'échapper si longtemps à la justice internationale. Selon lui, Richard Holbrooke, le négociateur américain des accords de Dayton ayant mis fin à la guerre (novembre 1995), aurait promis qu'en échange de son retrait de la vie politique et publique, il ne serait pas poursuivi, ce que ce dernier a toujours démenti. M. Karadzic a aussi affirmé à plusieurs reprises que Richard Holbrooke voulait sa mort. “Il est clair que mis dans l'incapacité de tenir les engagements qu'il avait pris au nom des USA, il est passé au plan B, la liquidation de Radovan Karadzic”, a-t-il ainsi écrit. Il a demandé à ce que le juge néerlandais désigné pour présider les audiences jusque-là soit récusé, au motif que des jugements antérieurs le rendraient partial, et en raison de sa nationalité, une manœuvre classique. C'est en réalité pour des raisons de procédure et d'organisation que le tribunal a décidé de confier l'affaire à une autre chambre. Karadzic, ancien homme fort de Pale, la capitale de la république autoproclamée des Serbes pendant la guerre, qui avait exercé la psychiatrie à Sarajevo avant le conflit, s'était rendu méconnaissable durant sa traque. Au moment de son arrestation, il arborait une grande barbe blanche, une abondante chevelure, surmontée parfois de grandes lunettes ou d'un chapeau, tout en exerçant la médecine alternative sous l'identité du “Dr Dragan Dabic” à Belgrade. D. S./AGENCES