Après dix-huit jours de protestation, le président égyptien Hosni Moubarak s'est donc résolu à quitter ses fonctions, transmettant directement le pouvoir à l'armée. Le vice-président Omar Souleimane a fait cette annonce, vendredi, provoquant une explosion de joie sur la place Tahrir au Caire. En moins de vingt-quatre heures, les événements se sont succédé à un rythme infernal, en Egypte. L'allocution du président Hosni Moubarak, jeudi, où il se proposait de conduire les réformes institutionnelles promises, tout en déléguant ses pouvoirs à son vice-président, a laissé les centaines de milliers de manifestant égyptiens sur leur faim, lesquels s'attendaient à sa démission et se préparaient à célébrer l'annonce sur la place Tahrir, au Caire. Désarçonnés, les manifestants promettaient pour hier un vendredi d'«assaut » après la rituelle prière du vendredi, en commençant par assiéger certains édifices publics, dont le siège de la télévision nationale, et, dans certains villes, comme Alexandrie, à s'attaquer à des résidences d'Etat. Les autorités redoutaient une ruée sur le palais présidentiel, ce qui obligerait les troupes militaires qui en assurent la protection à réagir. D'aucuns dans la classe politique prédisaient un «bain de sang». Mohammed El-Baredei a ouvertement appelé à l'intervention de l'armée pour démettre le président. Celle-ci continuait à adopter une position de «wait and see», tout en brandissant, à chaque fois, son «devoir d'intervenir pour protéger le peuple». Mais son discours entretenait sciemment l'ambigüité. Elle a appelé hier, suite à une réunion du conseil de sécurité, tenue en l'absence du président, quelque heures avant le discours de ce dernier, promettant d'être du côté du peuple, avant de se ressaisir, une heure après le discours du raïs, «à un retour à la normale dans le pays et en mettant en garde contre toute atteinte à la sécurité de l'Egypte», tout en se portant garante des réformes promises par le président Hosni Moubarak. Ce qui semblait loin d'être suffisant pour calmer les foules qui réclamaient toujours le départ immédiat et sans condition du chef de l'Etat, et qui continuaient à affluer dans les rues. Ce qui a fait planer une situation chaotique pour les prochaines heures et les prochains jours. Ultime rebondissement : au milieu de l'après-midi, une information non confirmée annonçait que le président et sa famille aurait quitté le Caire pour Charm El-Cheikh, à bord d'un avion. Suivie d'un ballet d'hélicoptères militaires autour du palais présidentiel au quartier Al-Ourouba. La révolution a triomphé. Une nouvelle ère s'ouvre pour l'Egypte.