La représentation Pose ta valise a sonné, mardi à Béjaïa, comme un hymne à la vie, une sentence à cesser le voyage, invitant ses candidats à une devise simple : «Vis l'instant là où tu es, car la vie n'est pas éternelle.» En reprenant le répertoire subtil de la chanson de l'exil, dont des morceaux mythiques de Slimane Azem, Cheikh El-Hasnaoui et H'nifa, Géraldine Benichou, metteuse en scène au théâtre du Grabuge de Lyon (France), a réussi le tour de force de transformer «la tragédie de la transplantation» en fresque musicale adoucie et adoucissante. Car dans son regard, la ritournelle de l'émigration est certes une complainte, mais reste un moment de vie et de transformation. Pour y parvenir, son choix s'est porté sur l'ivresse que procurent les mots et le bon refrain musical. Elle a fait évoquer «Tamurth», «Lebled» et «El-Ghorba», en prenant soin de ne pas tomber dans «le misérabilisme» que peut supposer l'exil, mais en focalisant sur la continuité de la vie et les espoirs qu'elle offre. Elle n'est plus dans l'esprit de Lemsafer irouh wey welli (le voyageur revient toujours) de Dahmane El-Harrachi, mais dans la logique de «Ayakchiche (jeune homme) pose ta valise» de Cheikh El-Hasnaoui, qui exhorte à dépasser les vicissitudes de «l'immigré», à bien vivre, sans pour autant se couper de ses racines et de sa culture.